Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, André Lamontagne, a personnellement autorisé le congédiement de l'agronome Louis Robert de son ministère jeudi dernier. Ce dernier, qui y travaillait depuis 32 ans, a dénoncé par le passé à Radio-Canada « l'ingérence du privé dans la recherche publique sur les pesticides », rapporte la société d'État.

« La décision qui a été prise par le ministère [de congédier le fonctionnaire] est une décision que j'ai personnellement autorisée à la lumière des informations que j'ai recueillies [...]. C'est une décision que j'ai jugé importante à prendre », a dit M. Lamontagne mercredi à son arrivée à une réunion du caucus de la Coalition avenir Québec (CAQ) en Outaouais.  

Selon Radio-Canada, Louis Robert a été congédié du ministère alors que deux de ses collègues ont également été suspendus. Travaillant au bureau de Saint-Hyacinthe du ministère de l'Agriculture, des Pêches et de l'Alimentation, l'Agriculture, ce dernier avait fourni par le passé à la télévision publique « des documents accablants » sur l'ingérence du privé dans la recherche publique sur les pesticides. Il était à l'époque « insatisfait de l'écoute de ses supérieurs », écrit Radio-Canada.  

En après-midi, mercredi, le journaliste Thomas Gerbet a publié sur son compte Twitter une copie de la lettre de congédiement qui a été remise à Louis Robert.  

« En février 2018, vous avez fait preuve d'un manque de loyauté envers votre employeur en transmettant un document confidentiel au journaliste Thomas Gerbet. De plus, il s'agissait d'un geste planifié et volontaire », lui reproche Alain Fournier, directeur général du développement régional au ministère de l'Agriculture.  

« De mai 2017 à février 2018, vous avez contrevenu à votre obligation de discrétion et à la Politique de relations avec les médias du MAPAQ en ayant certains échanges avec différents journalistes [...]. Devant un tel comportement et compte tenu des mesures antérieures à votre dossier, soit la lettre d'avertissement du 7 mai 2018 relatant un comportement inapproprié de votre part qui allait à l'encontre de votre devoir de loyauté et de civilité, je n'ai d'autre choix que de vous [congédier », conclut M. Fournier.  

Un « ensemble de facteurs », dit pourtant le ministre 

À Gatineau, le ministre André Lamontagne a pourtant dit mercredi que Québec « ne prendrait [jamais] une mesure contre quelqu'un qui dénoncerait quelque chose qui va à l'encontre de la santé publique. »

« Il faut être prudent dans ce dossier. [...] Il y a un ensemble de facteurs dans ce dossier qui ne sont pas nécessairement tous connus », a brièvement défendu M.  Lamontagne.  

Or, le congédiement du fonctionnaire cause déjà des remous à Québec. Sylvain Roy, député du Parti québécois dans la circonscription de Bonaventure, souhaite la réembauche immédiate de l'agronome au sein de son ministère.

« On s'aperçoit que le gouvernement caquiste est en train de récupérer des pratiques dignes du gouvernement Harper. On essaie de museler la science quand idéologiquement, ça ne fait pas notre affaire », a déploré le député, réclamant du même souffle que Québec permette aux lanceurs d'alerte de parler aux médias d'information sans risquer leur carrière.  

« L'agronome Louis Robert a 32 ans d'expérience au MAPAQ et est une sommité dans son domaine. À Québec solidaire, nous voulons le rencontrer, nous sommes prêts à entendre ce qu'il a à dire. Le ministre de l'Agriculture André Lamontagne aurait dû prêter oreille à son expertise plutôt que de le mettre à la porte. Est-ce que c'est monnaie courante que le gouvernement agisse ainsi avec les chercheurs et s'ingère dans la diffusion et l'interprétation des résultats de recherche ? Le ministre musèle-t-il ses scientifiques ? », s'est pour sa part indignée la solidaire Émilise Lessard-Therrien, députée de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.