Trente et une entreprises ont retourné 95 millions de dollars à des organismes publics, surtout des villes, dans le cadre du programme de remboursement volontaire de l'argent obtenu par la collusion, la corruption ou la fraude. Montréal entend maintenant poursuivre ceux qui ne se sont pas prévalus de cet exercice.

La ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a déposé au Salon bleu mercredi le rapport de mise en oeuvre de ce programme lancé en 2015. Il permettait aux entreprises de rembourser des sommes qu'elles avaient obtenues frauduleusement depuis 1996 en échange d'une quittance de la part de l'organisme public concerné.

SNC-Lavalin, Cima+, Construction DJL et Dessau avaient déjà manifesté publiquement leur intention de participer au programme. Leur nom figure dans le rapport, mais on ignore le montant remboursé dans chaque cas. 

Les autres entreprises qui ont retourné de l'argent sont : AXA Assurances (société dissoute et représentée par Intact), Axor Experts-Conseil, Béluga Construction, BPR, Construction AQUI, Construction DAMC (Domenico Cammalerri, Domenico Miceli et Giovanna Miceli), Construction IREBEC (Nicolo Milioto, Alfonso Polizzi et Girolamo Vella), Corporoche, Équation Groupe Conseil, Equiluqs, Filiatrault, McNeil & Associés, Génius Cobseil (autrefois Groupe Séguin), Groupe Dubé, Dufresne Asphalte, Génipur, Groupe S.M., Entreprises V.G., Les services EXP, MLC Associés, Pavage ATG, Pavage CSF, Sintra, Valmont Nadon Excavation, WSP Canada. 

Des personnes physiques ont également fait un remboursement : Claude Asselin (ex-directeur général de la Ville de Laval) et Laurent Gravel (ancien ingénieur de la Ville de Montréal).

Le rapport note que 19 autres personnes physiques et entreprises ont participé au programme sans toutefois avoir conclu un règlement.

Le ministère des Transports a récupéré des sommes payées en trop, mais on ignore sa part parmi les 94,75 millions remboursés. Pour le reste, ce sont des villes qui ont bénéficié d'un remboursement, dont Montréal, Québec, Laval, Longueuil, Boisbriand, Deux-Montagnes, Drummondville, Gatineau, Laval, Mascouche, Mirabel, Saint-Jérôme, Sherbrooke, Terrebonne et Victoriaville. Au total, 32 organismes publics ont conclu au moins un règlement dans le cadre du programme. Douze autres, dont on ignore l'identité, ne sont pas parvenus à un accord.

Selon le rapport, le programme est à coût nul pour les contribuables puisque les participants ont dû verser, à titre de frais d'administration, une somme supplémentaire qui représente 10 % du montant de leur proposition. Il a été administré par l'ancien juge en chef de la Cour supérieure, François Rolland.

Le programme a pris fin en décembre. « Il importe de préciser que tous les organismes publics qui ne sont pas directement visés par une entente de règlement dans le cadre du Programme conservent leurs recours à l'égard des personnes physiques et des entreprises », souligne le rapport. Des mesures sont prévues pour faciliter les recours civils.

Pour Stéphanie Vallée, « le programme a atteint son objectif : récupérer en amont des procédures judiciaires, au nom des contribuables, une partie des deniers publics que l'Administration avait payés en trop. (...) Il nous a ainsi permis de récupérer en deux ans des sommes importantes à coût nul pour les contribuables, et ce, sans encombrer les tribunaux ».

Montréal compte poursuivre

Impossible de savoir combien la métropole a récupéré grâce à cet exercice. «La Loi nous l'interdit et on va respecter la confidentialité demandée», a indiqué la mairesse Valérie Plante.

L'élue a toutefois fait savoir que plusieurs joueurs soupçonnés d'avoir pris part aux stratagèmes ayant visé Montréal n'ont pas participé au programme de remboursement volontaire et que son administration comptait bien s'adresser aux tribunaux pour récupérer le dû des Montréalais. «Pour la ville de Montréal, ça ne s'arrête pas là. On a bien l'intention d'intenter des poursuites pour ceux qui n'ont pas pris l'opportunité de participer au programme. L'argent quoi a été pris aux Montréalais doit retourner aux Montréalais», a martelé Valérie Plante.

- Avec Pierre-André Normandin, La Presse