La nomination d'un unilingue anglophone comme Rob Nicholson au poste de ministre des Affaires étrangères est «loin d'être souhaitable», a déploré le premier ministre Philippe Couillard, hier. Une sortie qui survient alors que l'opposition lui reproche de faire preuve de mollesse face au gouvernement Harper.

«On a un pays, le Canada, où il y a deux langues officielles, a déclaré M. Couillard. C'est un poste senior de gouvernement. Je m'attendrais au moins à ce que le ministre des Affaires étrangères puisse au moins dire quelques mots en français.»

Le chef libéral se défend de s'immiscer dans les prérogatives du gouvernement fédéral. Mais il maintient que le chef de la diplomatie canadienne devrait être bilingue.

«Il n'est pas trop tard pour prendre des cours, a dit M. Couillard. Il y en a qui l'ont déjà fait.»

La ministre des Relations internationales, Christine St-Pierre, a abondé dans le même sens, en estimant «très décevant» le choix de Stephen Harper. À ses yeux, les commentaires qui ont suivi la nomination de M. Nicholson devraient envoyer un message clair au premier ministre fédéral.

«Il faudrait qu'il regarde ça de plus près parce qu'on s'attend à ce que le chef de la diplomatie canadienne soit capable de s'exprimer en français, en anglais, bien sûr, mais aussi en français et qu'il soit capable de représenter tous les Canadiens lorsqu'il est à l'extérieur, a-t-elle dit. C'est l'image du Canada.»

Trop «mou»

Selon les partis de l'opposition, le gouvernement libéral doit se faire plus incisif à l'égard du gouvernement conservateur.

Le Parti québécois a rappelé que M. Couillard a été critiqué, l'automne dernier, pour avoir prononcé un discours entièrement en anglais lors d'un voyage en Islande. Son chef par intérim, Stéphane Bédard, accuse le gouvernement libéral de négliger les intérêts du Québec et la promotion du français sur la scène internationale.

Il qualifie d'«à-plat-ventriste» l'attitude du gouvernement libéral. «Le Québec est maintenant absent sur la scène internationale, d'autant plus que M. Couillard a fermé ou donné moins de moyens aux délégations [à l'étranger], a dénoncé M. Bédard. Ce qui fait que le rôle du Québec, et surtout la force du français, n'est plus reconnu sur la scène internationale.»

Le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, somme lui aussi le premier ministre de dénoncer de manière plus explicite la nomination de M. Nicholson. La retenue du premier ministre trahit à ses yeux un «malaise» sur la question identitaire.

Au bureau du premier ministre Stephen Harper, on indique que M. Nicholson est sensible au fait français au Canada. «Le ministre a pris des leçons de français dans le passé, a indiqué le porte-parole du premier ministre, Carl Vallée, et il s'est engagé à continuer ses efforts.»

- Avec la collaboration de Tommy Chouinard