Le Parti libéral du Québec (PLQ) pouvait compter sur la firme de génie Roche pour subvenir à ses besoins monétaires, croit l'Unité permanente anticorruption. Deux députés auraient bénéficié de cette aide lors de la campagne électorale de 2008, dont Georges Mamelonet qui ouvre même la porte à un retour d'ascenseur.

Financement hors-norme: Boisbriand n'est pas un cas unique

C'est ce que révèlent notamment les documents judiciaires présentés par l'UPAC pour l'obtention d'un mandat de perquisition chez Roche, en janvier dernier. Lors d'une première perquisition policière menée en 2010 chez Roche, les enquêteurs ont mis la main sur une correspondance par courriel qui démontre qu'une personne dont le nom est caviardé «a récolté du financement pour [...] député de la circonscription [...] en 2008 pour le PLQ». L'objectif aurait été «de placer la firme stratégiquement sur l'échiquier des élus». 

«Le fait pour la firme Roche d'être présente et reconnue comme faisant partie des entreprises sur laquelle le PLQ peut compter afin de subvenir à ses besoins monétaires, lui permet de détenir les liens privilégiés nécessaires avec les membres influents du gouvernement et, ainsi, obtenir un avantage certain pour ses clients : les élus municipaux et les projets travaillés», peut-on lire dans l'affidavit signé par l'enquêteur Jean-François Rail de l'escouade Marteau. 

Des échanges courriels impliquant le président de Premier Tech, Henri Ouellet, datés du 4 décembre 2008 - donc 4 jours avant le scrutin qui va reporter au pouvoir Jean Charest et son équipe -, indique qu'une personne a été sollicitée pour «ramasser 5000 $» pour le député du PLQ Georges Mamelonet et un autre, qui le deviendra et dont le nom est caviardé. On demande 1000 $ à M. Ouellet.

Au lendemain de l'élection du 8 décembre 2008, des courriels sont échangés entre une personne de chez Roche et le député Georges Mamelonet (2008 à 2012). Après avoir été félicité de sa victoire, M. Mamelonet indique à son interlocuteur qu'il peut être «assuré qu'il sera au rendez-vous pour Roche». 

En 2008, le PLQ a fait élire 23 nouveaux députés. 

 

Photothèque Le Soleil

Georges Mamelonet

Le maire de Gaspé corrompu

Les interventions politiques de Roche étaient également dirigées vers l'hôtel de ville de Gaspé. Selon l'UPAC, la firme Roche aurait corrompu l'ancien maire de Gaspé, François Roussy, en l'invitant en France, toutes dépenses payées, pour une semaine de congrès sur l'ingénierie. 

De plus, la Ville de Gaspé aurait obtenu une ristourne de 5 % sur des contrats d'ingénierie qu'elle avait attribués afin de nourrir son fonds de renouvellement des infrastructures.

Parmi les informations recueillies par l'UPAC, on retrouve un courriel datant de février 2009. Une personne y explique que le maire de Gaspé, François Roussy, lui a demandé «de retourner à la municipalité 5 % des honoraires engendrés par les contrats dans le fonds de renouvellement des infrastructures».

On explique que cette ristourne permettait de financer certains projets de la communauté de Gaspé et qu'elle était imposée par la municipalité. «Il s'agissait d'une condition sine qua non afin de se faire octroyer des contrats par la municipalité», peut-on lire.

Ne reculant devant aucun moyen pour obtenir des faveurs de la Ville, la firme Roche s'est impliquée dans la relance du club de hockey; elle a amassé des commandites auprès d'entreprises locales (Premier Tech et Béton Provincial) et a remis cette somme au club de hockey «en son seul nom».

«Un plan de commandite du club est dressé par Roche avec de le financer à la demande de François Roussy, maire de Gaspé», explique-t-on dans les documents qui demeurent partiellement caviardés. On ajoute que la firme Roche devient ainsi «un sauveur de la communauté et écarte les firmes en compétition pour des contrats».

Photothèque Le Soleil

François Roussy