À son tour, le monde municipal exprime «son profond malaise» à l'égard du projet de loi privé 204 sur l'amphithéâtre de Québec. Le départ avec fracas de trois députés péquistes illustre parfaitement l'inconfort que suscite ce projet de loi, a soutenu lundi le président de la Fédération québécoise des municipalités, Bernard Généreux.

«Nous ne sommes pas les seuls à ressentir un malaise, de toute évidence», a dit M. Généreux, lors d'une entrevue accordée à La Presse Canadienne.

En mettant à l'abri des contestations judiciaires l'entente de gestion entre la Ville de Québec et le géant Quebecor, le projet de loi fait fi des saines règles de gouvernance, selon le président de la fédération qui regroupe 7000 élus au Québec.

Qui plus est, la pièce législative parrainée par la péquiste Agnès Maltais envoie un message «malsain» sur la réelle volonté de la classe politique d'assainir les pratiques de gestion des municipalités.

«On s'est imposé des changements et à la première occasion venue, moins d'un an après l'adoption du projet de loi 76, on essaie de la contourner par un «bill» privé. Je me dis, ça ne marche pas», a lancé M. Généreux.

Resserrement des règles d'octroi des contrats, obligation de se doter d'une politique de gestion contractuelle, nouvelles règles d'éthique, tous les efforts déployés pour améliorer les moeurs municipales ne semblent pas faire le poids devant les visées «électoralistes» des uns et des autres, estime le président de la FQM.

«À quoi on joue? Il y a ce sentiment que l'Assemblée nationale est en train de perdre son sens critique et d'analyse nécessaire à l'adoption d'une loi. Je suis déçu de voir qu'on se permet ce genre de débat politique dans un contexte où on vient de vivre une révision profonde de nos règles de gouvernance en matière de gestion de contrat», a-t-il dit.

Or, même si le contrat de gestion conclu entre la Ville de Québec et Quebecor n'est «pas clair au plan de la transparence», il donne lieu à un «grand concert d'unanimité forcée», a déploré M. Généreux.

«Les gens voient cela et c'est un très mauvais message. Ce qu'on est en train de faire va miner la crédibilité du monde municipal», a-t-il prédit.

M. Généreux souhaite que le gouvernement Charest renonce à inclure les dispositions du projet de loi sur l'amphithéâtre dans une loi omnibus. Contrairement à ce qu'avance le maire de Québec, Régis Labeaume, il n'y a pas d'urgence à régler ce dossier à toute vapeur, estime-t-il.

«Il y a moyen de se donner du temps. (Pierre Karl) Péladeau (pdg de Quebecor) est capable d'attendre trois mois», a insisté le président de la FQM, inquiet de voir l'Assemblée nationale «banaliser des questions liées à la transparence et l'éthique».

M. Généreux en appelle à l'ensemble des députés pour qu'ils se «ressaisissent et ne nous entraînent pas plus loin dans ce psychodrame politique».

De son côté, le ministre des Affaires municipales, Laurent Lessard, n'a pas semblé démonté par la sortie de la FQM.

Il a plutôt voulu se faire rassurant sur la légitimité du projet de loi 204.

«On voulait se mettre à l'abri de la malversation, de la corruption, de la collusion. Dans le cas qui nous concerne, s'il y en avait eu, il n'y a personne qui ne pourrait pas se faire attaquer là-dessus», a-t-il déclaré.