Nouveau rebondissement dans le dossier des services en français en Ontario: la Chambre des communes demande au gouvernement Trudeau de présenter d'ici le 1er décembre un plan pour appuyer les projets des Franco-Ontariens qui leur permettront d'obtenir de meilleurs services dans leur langue.

Le député conservateur Alain Rayes, qui est aussi le lieutenant politique d'Andrew Scheer au Québec, a proposé à l'issue de la période de questions une motion en ce sens qui, contre toute attente, a été adoptée à l'unanimité.

La motion présentée par M. Rayes se lit comme suit: «que la Chambre demande au premier ministre et à la ministre des Langues officielles d'utiliser leur autorité à l'intérieur de leur champ de compétence pour développer un plan qui assurera que le gouvernement fédéral travaille en partenariat avec le gouvernement de l'Ontario dans tous les projets qui appuient l'épanouissement des services en français en Ontario, et que ce plan soit déposé au plus tard le 1er décembre 2018».

Cette motion a été adoptée après que le chef conservateur Andrew Scheer a réclamé en matinée une rencontre avec le premier ministre Justin Trudeau afin de discuter des mesures que doit prendre le gouvernement fédéral pour soutenir les Franco-Ontariens dans leur quête pour améliorer les services en français en Ontario.

Dans une lettre qu'il a fait parvenir au premier ministre, lundi, M. Scheer affirme qu'il «est temps de passer de la parole aux actes» et de prendre un engagement fermes envers les Franco-Ontariens.

M. Scheer a décidé d'envoyer cette lettre au premier ministre après que les libéraux de Justin Trudeau l'eurent accusé, injustement selon lui, d'être le complice des coupes dans les services en français en Ontario décrétées par le gouvernement de Doug Ford. Dans une entrevue à La Presse, la semaine dernière, M. Scheer a d'ailleurs riposté en disant: «Jamais je n'aurais fait de telles compressions.»

«Depuis maintenant plus d'une semaine, notre pays est de nouveau témoin d'un élan de solidarité envers les communautés de langues officielles en situation minoritaires et plus particulièrement les francophones. Malheureusement, votre gouvernement a décidé d'utiliser un ton partisan, moralisateur et divisif sur cette question. Vous devriez savoir que la protection des langues fondatrices du Canada fait partie de ce enjeux avec lesquelles les politiciens ne devraient jamais faire de partisanerie», affirme M. Scheer dans sa lettre.

«Plus de 10 millions de Canadiens s'expriment en français et il s'agit de la langue maternelle pour des millions d'entre eux. Notre pays a le devoir fondamental de se souvenir de ses deux peuples fondateurs et de s'assurer d'offrir des services équivalents pour les francophones et anglophones en situation minoritaire partout sur son territoire. Je crois que le temps est venu pour vous de passer de la parole aux actes en prenant un engagement ferme envers les Franco-Ontariens», a ajouté le chef conservateur dans sa lettre.

M. Scheer a dit que le premier ministre ne devrait pas hésiter «une seconde» à faire en sorte que le gouvernement fédéral soit un partenaire avec le gouvernement de l'Ontario dans «tous les projets qui appuieront l'épanouissement du français en Ontario».

Invoquant la précarité des finances publiques,  le gouvernement Ford a provoqué une crise linguistique il y a 10 jours en mettant la hache dans le projet de création de l'Université de l'Ontario français, alors qu'il était sur le point d'aboutir, et en abolissant le Commissariat aux services en français, créé il y a huit ans.

Faisant face à une avalanche de critiques depuis l'annonce de ces coupes, et menacé d'être traîné devant les tribunaux, le premier ministre Doug Ford fait en partie marche arrière et tend une perche à la communauté franco-ontarienne.

Il a annoncé que son gouvernement va maintenir le poste de commissaire aux services en français et qu'il jouira toujours du pouvoir de mener des enquêtes indépendantes, même si ce poste se retrouvera sous la houlette de l'ombudsman de la province, et il ouvre la porte au financement de l'Université de l'Ontario français, mais seulement quand les finances de la province le permettront. Dans son énoncé économique de la semaine dernière, le gouvernement conservateur estimait à 14,5 milliards de dollars le déficit de la province pour l'exercice financier en cours

En outre, M.  Ford compte recréer un ministère des Affaires francophones en bonne et due forme, et indique que la responsabilité de ce ministère sera confiée à la Procureure générale de l'Ontario, Caroline Mulroney. En formant son cabinet, en juin, M. Ford avait opté pour un poste de ministre délégué aux Affaires francophones - des fonctions qui incombaient déjà à Mme Mulroney.

Mais les principaux acteurs de la résistance qui se mettait en branle depuis quelques jours chez les Franco-Ontariens ont jugé ces concessions «insuffisantes» et comptent maintenir la pression.