L'ancien ambassadeur du Canada en Arabie saoudite, expulsé début août au début de la crise entre Riyad et Ottawa, a ouvertement critiqué pour la première fois mercredi la « diplomatie Twitter » de son propre pays envers le régime saoudien.

Dans une interview à la chaîne CBC, Dennis Horak assure qu'il n'a pas été consulté avant l'envoi d'un tweet du ministère canadien des Affaires étrangères qui a mis le feu aux poudres en appelant Riyad à remettre en liberté des militants des droits de l'homme récemment arrêtés.  

« Ce fut une très grosse surprise », a commenté l'ancien diplomate, aujourd'hui à la retraite. Interrogé sur cette « diplomatie Twitter », M. Horak reconnaît « ne pas en être fan ».

Ce tweet, traduit en arabe, avait provoqué la colère des autorités saoudiennes. Celles-ci avaient immédiatement réagi en annonçant l'expulsion de l'ambassadeur du Canada, en gelant tout nouveau commerce ou investissement avec ce pays et en ordonnant le départ des étudiants saoudiens au Canada.

« Je crois que nous sommes allés trop loin », juge-t-il aujourd'hui, tout en estimant que l'Arabie saoudite avait « surréagi » après ce tweet.

Dennis Horak juge que le gouvernement de Justin Trudeau a plus cherché à plaire à des organisations comme Amnistie internationale qu'à essayer de faire évoluer les choses en Arabie saoudite.

« J'ai l'impression que les applaudissements que le gouvernement a reçus d'Amnistie internationale et d'autres organisations sont bien accueillis par le gouvernement, et peut-être à juste titre. C'est peut-être ce qui le motive », dit-il à la chaîne publique.

Mais Riyad a cru que le Canada, avec son tweet, ciblait la population saoudienne, alors partagée sur les réformes menées par le prince héritier Mohammed ben Salmane, estime l'ex-ambassadeur.

Certaines réformes, comme l'autorisation de la conduite pour les femmes, étaient populaires, mais une partie de l'opinion jugeait que « l'Arabie saoudite était peut-être trop ouverte face aux exigences occidentales », selon lui.

« Cela aurait pu leur donner des munitions pour dire : "Regardez, regardez, nous sommes bousculés par l'Occident, ils exigent maintenant que notre système judiciaire fasse X, Y et Z" », poursuit-il.

Aujourd'hui, le Canada ne doit pas présenter d'excuses, comme le souhaite Riyad, mais devrait tenter de renouer les liens avec l'Arabie saoudite, selon lui.

« Je ne sais pas si nous pouvons nous en sortir, mais nous devons commencer à nous décider : voulons-nous sauver cette relation ou pas », interrogé l'ancien diplomate. « Mais le voulons-nous ? Je ne sais pas ».