Lorsque l'événement du Stampede de Calgary se termine, en juillet, Stephen Harper a l'habitude de profiter de ses vacances jusqu'à la mi-août. Mais ça n'a pas été le cas cette année.

Alors que ses adversaires du Nouveau Parti démocratique (NPD) et du Parti libéral du Canada (PLC) Thomas Mulcair et Justin Trudeau, parcourent le pays en cette période préélectorale, M. Harper a prématurément quitté la résidence estivale du premier ministre, au lac Mousseau, pour discuter de la situation au Sénat.

Depuis que le jugement de la Cour suprême est tombé, en 2014, sur la réforme de la Chambre haute, le caucus conservateur tente de trouver des moyens de revoir ses modes de fonctionnement en réaction aux nombreux scandales qui l'affectent depuis trois ans.

L'arrêt du plus haut tribunal du pays a toutefois réduit considérablement la marge de manoeuvre du gouvernement, qui ne peut pas agir sans l'accord des provinces. Toute réforme nécessiterait l'appui de sept provinces représentant 50% de la population canadienne et l'abolition serait conditionnelle à leur appui unanime.

Or, les conservateurs tenaient à agir sur ce front. Lors de l'élaboration de la plateforme électorale en vue du scrutin automnal, le parti a examiné plusieurs avenues qui pourraient s'offrir à lui.

La réforme du Sénat était une idée chère aux yeux des partisans du défunt Parti réformiste du Canada, dont certains députés actuels avaient été élus d'abord sous la bannière de l'ancien parti. Le député albertain Peter Goldring - qui ne se représentera pas aux prochaines élections - fait partie de ce lot.

Il a publié un communiqué, vendredi, pour exposer l'une de ses propositions pour régler le problème: le gouverneur général pourrait sélectionner lui-même les sénateurs.

«Les sénateurs devraient être choisis par le gouverneur général, tel que notre Constitution l'édicte actuellement. (Les nominations) pourraient être basées entre autres sous la recommandation des lieutenants-gouverneurs des provinces. L'aspect partisan, qui est au coeur des scandales, se verrait considérablement diminué», a-t-il expliqué.

En somme, il n'y a pas eu de consensus au sein du parti sur les mesures à prendre pour réformer le Sénat. Malgré cela, Stephen Harper a annoncé vendredi qu'il ne nommerait plus de sénateurs jusqu'à nouvel ordre pour prouver aux provinces que des changements sont nécessaires.

La nouvelle du moratoire était pourtant censée sortir lors de la campagne électorale officielle. M. Harper visait entre autres à prendre de court ses adversaires néo-démocrates qui militent depuis longtemps pour l'abolition du Sénat et ainsi leur démontrer que l'enjeu était entre les mains des provinces.

Certains conseillers de M. Harper lui avaient suggéré d'attendre à la campagne électorale, mais d'autres arguaient que ce n'était pas du «matériel électoral» puisque ce n'est pas le gouvernement fédéral qui sera appelé à trancher sur la question.

Cependant, la reprise du procès du sénateur suspendu Mike Duffy, dans deux semaines, risquait de ramener le sujet à l'ordre du jour, que les conservateurs le veuillent ou non - surtout  que le premier témoignage sera celui de l'ancien chef de cabinet de Stephen Harper, Nigel Wright.

D'ailleurs, en faisant cette annonce aux côtés du premier ministre de la Saskatchewan Brad Wall, M. Harper se retrouvait en terrain ami. M. Wall milite pour l'abolition du Sénat et certains évoquent même son nom comme successeur possible à Stephen Harper à la tête du Parti conservateur.