Le premier ministre Stephen Harper a suggéré aux provinces de tourner la page sur le débat entourant le financement fédéral en santé, que son gouvernement a récemment modifié.

De passage à Saguenay pour annoncer un investissement pour des infrastructures maritimes, M. Harper a invité ses homologues provinciaux à se concentrer plutôt sur l'amélioration de l'offre de services en soins de santé.

À l'autre bout du pays, les premiers ministres provinciaux ont pour leur part exprimé leur volonté de prendre les choses en main. Réunis à Victoria, ils ont aussi reproché à M. Harper d'avoir décidé unilatéralement de la méthode de calcul des transferts en santé, une fois l'accord actuel entre Ottawa et les provinces terminé en 2014.

Les premiers ministres s'inquiètent de voir les prochains versements être liés à la croissance économique. Certaines provinces craignent de ne pas disposer des fonds nécessaires pour assumer les coûts du vieillissement de leur population.

Lors d'un point de presse, en réponse aux journalistes, M. Harper a répété que son gouvernement fournissait un financement stable et prévisible pour les provinces.

Alors que certaines provinces, dont le Québec, se plaignent du manque à gagner que le changement de calcul leur causera, M. Harper a fermé la porte à toute négociation sur le niveau de financement.

«Les chiffres concernant les transferts sont bien connus, a-t-il dit. J'espère que les provinces se concentreront sur ce que, je crois, les Canadiens attendent: non pas sur un débat à propos de l'argent investi mais vraiment en examinant ce qu'il faut faire pour offrir plus efficacement les services de soins de santé.»

Pendant ce temps, les premiers ministres des provinces ont chargé leur collègue manitobain Greg Salinger de présider un comité qui réunira les ministre des Finances des provinces et territoires afin d'évaluer les conséquences de la décision d'Ottawa concernant les transferts sur les soins de santé.

«Comme le fédéral refuse la discussion et le dialogue, on va le faire nous, on va le faire le travail», a déclaré le premier ministre québécois Jean Charest en conférence de presse.

«Là, nous aurons un portrait qu'on pourra partager avec la population canadienne pour qu'on puisse mieux mesurer les conséquences des décisions.

«Ça va se faire dans un esprit d'équité parce que nous sommes totalement convaincus que nous pouvons arriver à une solution typiquement canadienne qui est juste pour toutes les provinces et tous nos citoyens», a-t-il ajouté

De plus, le premier ministre de la Saskatchewan, Brad Wall, et celui de l'Île-du-Prince-Édouard, Robert Ghiz, coprésideront un groupe de travail pour tenter d'améliorer le réseau canadien de la santé.

MM. Ghiz et Wall ont reconnu qu'ils auraient préféré pouvoir compter sur un représentant d'Ottawa autour de la table, mais ils soutiennent que les Canadiens souhaitent que leurs élus agissent dans ce dossier.

M. Wall a indiqué que le groupe de travail permettra aux premiers ministres provinciaux d'échanger sur les meilleures innovations dans le domaine de la santé, notamment quant aux normes de qualité dans les soins. Il a ajouté que les provinces iront de l'avant malgré l'apparente fermeture du premier ministre Harper sur le financement.

«La situation que nous avons aujourd'hui au Canada est assez exceptionnelle puisque le gouvernement fédéral a décidé de se désister de ses responsabilités, a déclaré M. Charest. C'est sans précédent. Pourtant, ça touche directement le vie quotidienne de tous nos concitoyens qui reçoivent des services de santé, les personnes âgées, les plus démunis.»

Infrastructures maritimes

M. Harper était à Saguenay pour annoncer un investissement de 15 millions $ en infrastructures maritimes.

L'argent servira à construire une gare intermodale sur le site du port de Saguenay ainsi qu'un tronçon de 12,5 km pour relier le port au réseau ferroviaire existant. Le projet de construction doit être complété avant mars 2014.

En annonçant cet investissement, M. Harper a déclaré que ce financement servira aux entreprises du nord du Québec qui veulent expédier leurs marchandises.

«Il sera désormais possible pour une entreprise de Chibougamau d'envoyer ses produits ici par train et de les expédier directement sur les marchés mondiaux, plutôt que de dépenser des sommes considérables afin de passer par Montréal», a-t-il dit.

Le budget total de la construction est de 36 millions $ et le gouvernement québécois, dont le développement économique du nord du Québec est le projet emblématique, étudie la possibilité de contribuer aussi.

Présent lors de l'annonce, le ministre délégué aux Ressources naturelles du Québec, Serge Simard, a reconnu que son collègue délégué aux Transports, Norman MacMillan, avait pourtant déjà signifié son refus à la ville de Saguenay.

«Norman a effectivement dit, il y a quelques mois, qu'il n'y avait pas d'argent actuellement pour le projet, a dit le ministre Simard lors d'un point de presse. On parle de quelques mois. Maintenant on va faire cheminer le dossier, on est en 2012 et on va regarder pour que le dossier puisse cheminer et avoir une certaine écoute.»

Alors que le gouvernement québécois a été l'objet de critiques récemment concernant ses dépenses en infrastructures pour le Plan Nord, M. Simard a nié qu'Ottawa ait pris Québec de vitesse.

«On ne s'est pas fait damer le pion, encore une fois, je le répète, c'est en collaboration avec le fédéral et on va continuer à faire notre travail», a-t-il dit.

M. Simard a soutenu que le projet ferroviaire servira au secteur minier, dont il est responsable.

«Pour être en mesure de bien desservir le Plan Nord, vous comprendrez qu'une desserte ferroviaire, au niveau d'un port de l'importance de Saguenay, c'est indéniablement très logique», a-t-il dit.