Le gouvernement Harper a présenté jeudi une réforme de la carte électorale qui diminuera le poids du Québec au Parlement. Un projet qui a immédiatement été qualifié d'«insuffisant» par le gouvernement Charest.  

Le projet de loi, présenté jeudi par le ministre d'État à la Réforme démocratique, Tim Uppal, concrétise une promesse électorale du Parti conservateur. Il vise à corriger la sous-représentation de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique à la Chambre des communes.

«Cette loi permettra à chacune des provinces canadiennes de se rapprocher d'une représentation proportionnelle à sa population», résume le lieutenant de Stephen Harper au Québec, Christian Paradis.

Les Ontariens, par exemple, élisent 34,8% des députés à Ottawa, alors qu'ils représentent 38,9% de la population du pays. Si la réforme est adoptée telle quelle, l'Ontario enverra 15 députés supplémentaires au Parlement. L'Alberta et la Colombie-Britannique compteront chacune six nouveaux sièges.

Le Québec, lui, enverra trois députés de plus à Ottawa, pour un total de 78. Il s'agit d'un gain par rapport à la précédente mouture de la réforme électorale, qui prévoyait l'ajout de 18 sièges en Ontario, 7 en Colombie-Britannique et 6 en Alberta. Aucun siège ne devait être accordé au Québec.

Malgré tout, le Québec pèsera un peu moins lourd au Parlement. Les Québécois occupent 24,4% des sièges aujourd'hui, ils en occuperont 23,3% au terme de la réforme.

Les Québécois représentent 23,2% de la population du Canada, selon les plus récentes projections.

Le gouvernement Charest s'est dit insatisfait de la proposition de jeudi, même s'il reconnaît qu'elle constitue une amélioration par rapport aux précédentes versions de la réforme.

«Ce n'est pas suffisant, a soutenu Yvon Vallières, ministre québécois des Affaires intergouvernementales canadiennes. On a eu trois motions unanimes à ce sujet à l'Assemblée nationale, il y a un consensus exceptionnel; le Québec ne veut pas voir diminuer son poids.»

Il souligne que l'accord de Charlottetown, qui a été repoussé lors d'un référendum national en 1992, aurait garanti constitutionnellement au Québec 25% des sièges aux Communes

C'est pourquoi la province «va marteler son point de vue» dans ce dossier, promet M. Vallières.

«Devant trois sièges de plus, les gens vont penser que le problème est réglé. Or, ce n'est pas le cas, conclut-il. On est à l'étape du projet de loi, il y a place à l'amélioration.»

Mais hormis le Bloc québécois, aucun des partis de l'opposition à Ottawa n'a fait écho à ces critiques, jeudi.

Le Nouveau Parti démocratique, qui compte 59 députés au Québec, avait déposé un projet de loi qui aurait préservé une proportion de 24% des députés québécois à la Chambre des communes. Malgré tout, la chef par intérim du parti, Nycole Turmel, s'est gardée de critiquer la formule retenue par le gouvernement Harper.

«À ce stade-ci, on est en train d'étudier toutes les possibilités pour essayer de faire en sorte qu'il y ait une représentation du Québec, mais des autres régions aussi, qui doivent augmenter leur nombre», a-t-elle dit.

«C'est important de protéger les intérêts du Québec parce qu'il représente une minorité linguistique importante dans le pays et une entité culturelle, a de son côté affirmé le chef libéral Bob Rae. Mais en même temps, nous devons reconnaître les demandes des régions dont la population augmente.»

L'ajout de 30 politiciens à la Chambre des communes s'accompagnera d'une facture pour les contribuables. Le gouvernement n'a pas été en mesure de fournir un chiffre précis, jeudi.

Selon certaines projections, l'élection des nouveaux représentants pourrait avoisiner les 14 millions. Quant aux coûts liés aux activités de ces députés - salaires, personnel, frais de déplacement, etc. -, ils seraient d'environ 19 millions par année.