Le gouvernement Harper s'est attiré les foudres des partis de l'opposition, mercredi, après avoir annoncé son intention d'adopter une loi d'exception pour mettre fin au lock-out décrété mardi soir par Postes Canada.



Cette annonce est survenue moins de 24 heures après que la ministre du Travail, Lisa Raitt, eut indiqué qu'elle présenterait un projet de loi pour mettre fin à un autre conflit de travail, celui qui met en cause les 3800 agents du service à la clientèle et des ventes d'Air Canada, en grève depuis lundi à minuit.

Dans les deux conflits, l'avenir du régime de retraite est au coeur du litige. Aux Communes, mercredi, le premier ministre Stephen Harper a affirmé que son gouvernement avait obtenu aux dernières élections le mandat de tout mettre en oeuvre pour protéger la croissance de l'économie canadienne. Selon lui, les conflits de travail à Air Canada et à Postes Canada pourraient compromettre la reprise économique, encore fragile.

«Les deux parties dans les conflits touchant Air Canada et Postes Canada ont été incapables jusqu'ici de conclure une entente. Devant leur incapacité de le faire, elles risquent de causer des dommages à d'autres secteurs de l'économie. Cela est inacceptable pour le gouvernement. Notre gouvernement va s'assurer de protéger l'économie canadienne et les intérêts supérieurs des Canadiens», a affirmé mercredi M. Harper.

Postes Canada a décrété un lock-out et suspendu ses activités partout au pays mardi soir, après un mouvement de grèves tournantes qui aura duré 12 jours.

Mme Raitt compte donc déposer aujourd'hui son projet de loi pour mettre fin à la grève des employés d'Air Canada. Il pourra être adopté la semaine prochaine au plus tôt, à moins que les deux parties ne s'entendent entre-temps.

Dans le cas du lock-out à Postes Canada, Mme Raitt a donné au greffier de la Chambre des communes, comme l'exigent les règles parlementaires, un avis de 48 heures avant de déposer une loi d'exception. Elle pourra donc le faire lundi au plus tôt puisque les Communes ne siègent pas vendredi en raison du congrès du NPD, qui a lieu en fin de semaine à Vancouver.

Le gouvernement Harper n'avait pas l'intention de se mêler du conflit de travail à Postes Canada tant que les employés se limitaient à des grèves tournantes qui ne visaient que quelques villes à la fois. Mais la décision de Postes Canada de décréter un lock-out a changé la donne.

Tout indique que le gouvernement Harper devra utiliser le bâillon pour forcer l'adoption rapide de ces deux projets de loi avant la fin de la session parlementaire, prévue le 23 juin. En effet, le NPD, traditionnellement proche des syndicats, s'oppose au recours à la voie législative pour mettre fin aux conflits de travail.

Les droits des travailleurs brimés, dit le NPD

Le chef du NPD, Jack Layton, a vertement critiqué la décision du gouvernement Harper, qui brime selon lui le droit des travailleurs d'utiliser des moyens de pression dans le cadre de négociations pour le renouvellement d'une convention collective.

«La stratégie du gouvernement est d'empêcher les travailleurs d'exercer leur droit de négocier. Les conflits de travail devraient être réglés de manière équitable à la table des négociations», a affirmé M. Layton.

Le chef du Parti libéral, Bob Rae, a aussi condamné les intentions du gouvernement Harper: «Il utilise une masse pour régler tous les dossiers. C'est problématique. [...] La manière dont il agit est injuste, et cela nous trouble.» Il a noté que les employés de Postes Canada sont prêts à reprendre le travail afin que les deux parties reprennent les négociations.

En fin de journée, mercredi, le président-directeur général de Postes Canada, Deepak Chopra, s'est dit prêt à rencontrer le président du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP), Denis Lemelin. En conférence de presse, en matinée, ce dernier s'était lui-même dit prêt à relancer les discussions dans la mesure où l'employeur modifierait le mandat de ses négociateurs.