Bafouant les règles des comités parlementaires, trois ministres conservateurs se sont présentés mercredi en lieu et place de leurs employés qui avaient été dûment convoqués comme témoins.

Dans un chaos et un désordre que la présidente du comité a comparé à une «cour d'école de 5e année», le ministre des Transports John Baird, le ministre des Ressources naturelles Christian Paradis et le ministre d'État de l'Agence fédérale de développement économique pour le Sud de l'Ontario, Gary Goodyear, se sont présentés comme témoins au comité permanent des opérations gouvernementales.

Les ministres Paradis et Goodyear avaient pourtant déjà refusé de comparaître devant ce même comité, a rappelé la députée libérale Siobhan Coady qui s'est étonnée de ce changement de stratégie.

Le comité tente de faire la lumière sur les activités de lobbying de l'ex-député conservateur Rahim Jaffer - également mari de l'ancienne ministre Helena Guergis - pour déterminer s'il a eu un accès privilégié aux oreilles du gouvernement.

Premier à s'insurger contre leur présence, le bloquiste Michel Guimond a rappelé que les comités sont maîtres de leur procédure et peuvent choisir leurs témoins comme ils l'entendent.

«En agissant de la sorte, les conservateurs, et particulièrement les trois ministres qui sont ici, font preuve d'une arrogance et d'un mépris évident à l'endroit de ce comité formé démocratiquement en vertu des règles de la Chambre des communes. Ils sont méprisants de la démocratie», a-t-il dénoncé avec vigueur, ajoutant qu'il n'était pas question qu'ils témoignent.

Ce que John Baird a aggressivement tenté de faire. Dans une scène chaotique, le ministre Baird a réclamé le droit de parler en proférant «point de procédure» à plus de 30 reprises, continuant même lorsque son micro fut éteint, martelant alors sur son bureau, ne s'arrêtant que lorsque les caméras de télévision sont entrées en trombe dans la salle.

Au moment le plus tonitruant, alors que les députés conservateurs et ceux de l'opposition s'échangeaient de cinglants commentaires, la présidente libérale du comité, Yasmin Ratansi, a rappelé qu'elle pouvait demander aux gardiens de sécurité d'expulser certains membres.

Le ministre Baird a été cinglant à son égard.

«J'ai dû m'y prendre à 50 reprises avant d'être entendu parce que vous ne connnaissez pas les règles. C'est une honte absolue. Ce sont les règles Yasmin, vous devriez essayer de les lire. Je m'attendais à une discussion intelligente, s'est-il exclamé, maintenant que les les députés ont le droit de participer aux comités.

Mais la présence de ces substituts était prévue. Le leader du gouvernement aux Communes avait déjà annoncé en Chambre que les ministres, en vertu du principe de responsabilité ministérielle, devaient répondre des actes de leurs employés et donc allaient dorénavant témoigner en comité à leur place.

Une façon de réécrire les règles du parlement de façon unilatérale, a dénoncé Michel Guimond, qui s'est lancé dans des discussions bouillantes avec les conservateurs.

La présidente a finalement décidé que les membres du comité pouvaient interroger les ministres s'ils le souhaitaient.

Leur temps devenu fort limité par tous ces débats, ils n'ont pas pu apporter de grandes clarifications.

Tout au plus, ils ont déclaré que tous les Canadiens ont le même accès au gouvernement que M. Rahim Jaffer. Pas d'entrée privilégiée, ont répété les trois ministres, soulignant que M. Jaffer n'a obtenu aucun fonds gouvernemental après ses démarches et que tous les contrats sont attribués selon un processus d'appel d'offre.

Christian Paradis a d'ailleurs témoigné qu'il est heureux d'écouter n'importe quel citoyen lui présenter des innovations, un sujet qui lui tient à coeur.

Mais à l'extérieur du comité, le ministre Paradis a néanmoins révélé que lorsque M. Jaffer l'a personnellement contacté, il a composé le numéro de son téléphone cellulaire.

Quant au sort des employés initialement convoqués, les libéraux et les bloquistes ont indiqué qu'il se réservaient le droit de les convoquer de nouveau, malgré la comparution des ministres.