De retour d'une prorogation qui a été fort contestée par l'opposition et par la population canadienne, le gouvernement conservateur entend reprendre le même discours qu'avant de quitter pour le congé des Fêtes: l'économie est sa priorité.

Mais ce statu quo risque justement d'irriter l'opposition, qui déplore que le premier ministre Stephen Harper n'ait rien de nouveau à proposer après avoir prorogé la session parlementaire pendant deux mois.

Le discours du Trône, qui sera prononcé mercredi après-midi, s'attardera en grande partie à l'agenda économique du gouvernement, soit à son plan de relance ainsi qu'à la lutte au déficit et au retour à l'équilibre budgétaire, selon une source gouvernementale.

Mais confronté à un déficit record de 56 milliards $ pour l'année 2009-2010, le gouvernement Harper a déjà fait savoir qu'il n'entreprendrait pas de mesures en ce sens avant l'année prochaine.

Pour le moment, il maintiendra le cap en mettant en oeuvre la seconde phase de son Plan d'action économique, entamé avec le dernier budget et qui a donné suite notamment à d'importants investissements en infrastructures partout au pays.

Pour l'année 2010-2011, les conservateurs dépenseront 19 milliards $ dans ce domaine et les mesures du Plan d'action prendront fin le 31 mars 2011.

Pour renouer avec l'équilibre budgétaire, le gouvernement réduira ses dépenses et n'aura pas recours à des hausses d'impôts ou à des réductions de transferts aux provinces, a réitéré la source gouvernementale.

Impossible, toutefois, de savoir concrètement quelle stratégie emploiera le fédéral pour réduire le déficit, ni si ce dernier a augmenté depuis la dernière sortie du ministre des Finances, Jim Flaherty, à ce sujet.

Il faudra attendre le budget, jeudi, pour en savoir plus.

Or, si le discours du Trône n'apporte rien de nouveau, cela confirmera que le premier ministre a prorogé le Parlement pour rien, a dénoncé le leader parlementaire bloquiste, Pierre Paquette.

M. Harper avait suspendu les travaux de la Chambre des communes et du Sénat, le 30 décembre, en plaidant qu'il était nécessaire de faire table rase car le pays entamait une nouvelle année et une nouvelle situation économique.

«S'il n'y a pas de modification majeure dans les orientations annoncées (jeudi), manifestement, on a prorogé pour rien, on n'a pas recentré du tout l'action gouvernementale comme on nous l'avait promis», a critiqué le bloquiste, en entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne.

«Et donc, je pense qu'à ce moment-là, on ira directement vers un budget qui sera inadmissible», a-t-il pressenti.

Au gouvernement, on affirme cependant qu'il y aura du nouveau dans le discours du Trône. Il faudra seulement patienter jusqu'à sa lecture par la gouverneure générale Michaëlle Jean pour en prendre connaissance.

Le discours Un Canada plus fort. Une économie plus forte. Maintenant et pour l'avenir, qui devrait durer de 60 à 90 minutes, annoncera d'ailleurs le désir des conservateurs d'investir dans l'éducation, la formation ainsi que la recherche et le développement, a précisé la source gouvernementale.

Mais c'est trop peu, trop tard, selon le chef libéral, Michael Ignatieff.

«Il (M. Harper) a changé de cap en 2010, il pense que le gouvernement doit investir dans l'avenir des Canadiens, dans la haute technologie, dans les bonnes choses. Je veux bien, mais c'est quatre ans de retard, nous avons perdu quatre ans», a argué le leader du Parti libéral.

Outre l'économie, le discours du Trône qui ouvrira la nouvelle session parlementaire mercredi dressera par ailleurs l'agenda criminel des conservateurs, qui souhaitent de nouveau s'attaquer à la sécurité des familles et communautés canadiennes, ainsi qu'à la sécurité nationale.

Le gouvernement réitérera également son appui aux Forces armées et le changement de cap de leur mission en Afghanistan, qui ne sera plus militaire mais humanitaire à partir de 2011.

Le discours abordera enfin la souveraineté de l'Arctique, l'héritage autochtone du pays et l'environnement.

Les conservateurs devront se préparer à accueillir la critique cette semaine, puisqu'au lendemain du discours le ministre des Finances déposera son budget, jeudi.

Et ce sera l'occasion de voir si le gouvernement a su écouter les propositions des partis d'opposition, selon le chef du Nouveau Parti démocratique, Jack Layton.