(Québec) Québec pèse le pour et le contre de l’électrification rapide des autobus. La mesure est coûteuse et a un impact limité sur la réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Mais elle a des retombées économiques positives, avec Nova Bus et Lion, a plaidé François Legault.

« Il y a des questions qui se posent du côté de l’électrification des autobus. Donc, c’est quelque chose que [la ministre des Transports Geneviève Guilbault] regarde. On ne renonce pas aux cibles de réduction de GES puis on essaie, avec le Plan pour une économie verte, de choisir les investissements où il y a le plus de rendement, dans le sens de réduire les GES », a affirmé le premier ministre lors de la période des questions, mercredi.

« On est en train de regarder, quand on additionne les objectifs de réduction de GES et les retombées économiques, quels sont les investissements optimaux », a-t-il ajouté.

Depuis longtemps, les villes estiment que les cibles d’électrification du transport collectif du gouvernement Legault sont trop contraignantes, et que les coûts qu’elles engendrent sont énormes. Cet argumentaire a été repris par Québec solidaire, qui demande au gouvernement Legault d’investir son argent ailleurs.

13 milliards

« Savez-vous c’est quoi, la facture de l’électrification des autobus ? 13 milliards de dollars, 13 milliards de fonds publics pour même pas 0,4 % de nos émissions de gaz à effet de serre. Et, pendant ce temps-là, on coupe des lignes d’autobus. Ça n’a aucun, mais aucun bon sens », a déploré le chef parlementaire du parti, Gabriel Nadeau-Dubois.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

Gabriel Nadeau-Dubois

Le plan sur l’économie verte va être mis à jour dans les prochaines semaines. Il faut mettre notre argent là où ça marche, là où ça compte. Il faut ralentir l’électrification des autobus pour accélérer les services.

Gabriel Nadeau-Dubois

Le premier ministre a répliqué que l’économie « n’intéresse pas beaucoup Québec solidaire », car il faut soupeser, en plus de l’impact sur les GES, celle sur les retombées économiques de cette mesure phare du plan pour une économie verte. « On a la chance d’avoir des entreprises, d’abord, comme Lion, entreprise québécoise, Nova Bus, qui n’est pas une entreprise québécoise, mais on est quand même fiers de l’avoir chez nous, qui fabrique des autobus électriques », a dit M. Legault.

M. Nadeau-Dubois a ironisé en affirmant que M. Legault était isolé face au consensus réunissant « Vivre en ville, Équiterre, la Fondation David Suzuki, Québec solidaire », mais aussi le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon.

Lors des assises de l’Union des municipalités du Québec, la semaine dernière, M. Fitzgibbon a déclaré qu’il va « peut-être falloir regarder si on peut décélérer la vitesse à laquelle » il faut électrifier les autobus. « Ce qu’on a constaté, c’est que nos cibles sont nobles, la vitesse à laquelle on peut y arriver peut-être va être ajustée », a-t-il dit.

Coûteux

Le 10 mai, les maires ont demandé à Québec de reconnaitre qu’il a « une influence sur le déficit structurel des sociétés de transport » en raison de ses cibles d’électrification des parcs d’autobus, et souhaitent que la ministre Geneviève Guilbault retarde « l’atteinte des cibles d’électrification du transport collectif » puisque cela « limite les sommes disponibles pour le maintien d’actifs et ajoute une pression sur les opérations ».

Le maire Bruno Marchand a affirmé que pour sa seule ville, la facture de l’électrification est de 3 milliards. Et la chercheuse Brigitte Bouchard-Milord, de Polytechnique Montréal, a fait valoir qu’il était beaucoup plus rentable de convaincre un automobiliste de prendre un autobus à moteur diesel, ce qui retire quatre tonnes de GES, que de remplacer cet autobus par un autobus électrique, ce qui représente une baisse d’une tonne de GES par passager.

« On vous entend sur l’électrification. On vous a écoutés. Les cibles dans le Plan pour une économie verte partent d’une excellente intention. […] On a des cibles très, très ambitieuses : 55 % [d’autobus urbains électriques] en 2030 ; mais on entend bien que ça met beaucoup de pression. Je suis en train de réfléchir à quelque chose, je vous reviendrai », avait dit la ministre Guilbault.