(Ottawa) Vingt-trois sénateurs américains – démocrates et républicains – ont fait parvenir une lettre au premier ministre Justin Trudeau pour l’exhorter à hausser les dépenses militaires canadiennes afin d’atteindre la cible plancher de 2 % de l’OTAN.

Les sénateurs vont droit au but dans cette missive transmise à environ un mois et demi du prochain sommet de l’OTAN, qui se tiendra cette année à Washington.

« Nous vous écrivons pour exhorter votre gouvernement à respecter l’engagement convenu par tous les alliés de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) […] en augmentant les niveaux de dépenses de défense jusqu’à atteindre 2 % du produit intérieur brut (PIB) de chaque pays », écrivent-ils.

Qualifiant le Canada d’« allié précieux » de l’OTAN, ils soulignent que « l’Alliance transatlantique est aujourd’hui confrontée à l’une des menaces les plus graves de son histoire », et que tous les alliés doivent ainsi respecter les engagements pris en 2014 au Pays de Galles, et réaffirmé en 2023 à Vilnius.

« Alors que nous approchons du Sommet de l’OTAN de 2024 à Washington, D. C., nous sommes préoccupés et profondément déçus que les projections les plus récentes du Canada indiquent qu’il n’atteindra pas son engagement de 2 % au cours de cette décennie », poursuivent-ils dans la lettre publiée sur le site de CBC.

Selon les plus récentes estimations de l’alliance politico-militaire qui ont été publiées à la mi-mars, le Canada consacrera 1,33 % de son PIB au budget de la défense, et 14,4 % pour les dépenses d’équipement majeur, en 2023.

Le gouvernement Trudeau a annoncé dans une révision de la politique de défense dévoilée le 8 avril dernier qu’il s’engageait à augmenter les dépenses militaires dans les prochaines années jusqu’à consacrer 1,76 % du PIB au budget de la défense en 2029-2030.

L’ambassade des États-Unis au Canada ne s’était pas offusquée de l’absence d’une feuille de route vers l’atteinte de la cible de 2 % – à tout le moins, pas publiquement. L’ambassadeur David Cohen a salué « les engagements financiers fermes » du Canada.

Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, n’avait pas non plus lancé la pierre à Ottawa.

Un plan réclamé

Des sénateurs influents figurent parmi les signataires de la lettre envoyée au premier ministre Trudeau : on y retrouve entre autres les noms de Mitt Romney, Joe Manchin ou encore Ted Cruz. La missive est paraphée par 11 démocrates, 10 républicains et deux indépendants.

« Lorsque les États-Unis accueilleront le sommet de l’OTAN en 2024 pour définir les priorités pour l’année à venir, nous attendons de votre gouvernement et de tous les membres de l’OTAN qui n’ont pas atteint le seuil de 2 % de leurs dépenses de défense qu’ils aient un plan pour atteindre ce seuil », préviennent-ils.

La rencontre des membres de l’Alliance se tiendra dans la capitale fédérale américaine du 9 au 11 juillet.

Bill Blair cherche à minimiser

Le ministre canadien de la Défense Bill Blair s’est dit « sûr » qu’il parviendrait à convaincre « ces sénateurs préoccupés que le Canada sera un allié prêt et capable pour l’OTAN, pour l’Amérique du Nord et le NORAD et à travers le monde ».

« Nous savons que nous devons en faire davantage », a-t-il aussi fait valoir, sans s’engager à présenter aux alliés de l’OTAN – dont la majorité, soit 18 sur 31, devrait atteindre ou dépasse le fameux 2 % en 2024 – un échéancier vers l’atteinte de la cible.

La démarche américaine est gênante pour le Canada, a pour sa part réagi le député conservateur Pierre Paul-Hus : « Je trouve ça honteux que les sénateurs américains soient obligés de faire ça, d’envoyer une lettre au premier ministre du Canada pour lui dire, hey, monsieur, vous avez des obligations à respecter, faites-le ».

Le Parti conservateur ne s’est pas non plus formellement engagé à atteindre l’objectif.