(Ottawa) Signe qu’il n’a pas l’intention de tirer sa révérence malgré des sondages défavorables depuis près d’un an, Justin Trudeau compte nommer le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie François-Philippe Champagne au poste de coprésident de la prochaine campagne des libéraux au Québec, a appris La Presse.

La décision de confier la coprésidence de la campagne au Québec à M. Champagne illustre toute l’importance qu’accordent les stratèges libéraux à la bataille qu’ils devront livrer afin de conserver les acquis du parti dans la province.

Dans les rangs libéraux, M. Champagne est reconnu comme l’un des meilleurs communicateurs au Cabinet pour défendre le bilan du gouvernement Trudeau, contrer la montée du Parti conservateur au Québec et neutraliser les attaques du Bloc québécois.

Son énergie remarquable – certains l’ont surnommé le lapin Energizer en raison des innombrables heures qu’il consacre notamment à faire avancer de grands projets et à rencontrer les dirigeants d’entreprises pour attirer de nouveaux investissements étrangers au pays – est considérée comme une valeur sûre pour motiver les troupes au moment où Justin Trudeau s’apprête à briguer un quatrième mandat.

« Cette nomination est une excellente nouvelle pour nous », a confié une source libérale qui a requis l’anonymat parce qu’elle n’avait pas l’autorisation de parler publiquement de la décision du premier ministre.

« J’ai toujours répondu présent »

Rencontré par La Presse, jeudi, M. Champagne n’a pas voulu vendre la mèche au sujet du rôle important qu’il jouera lors de la prochaine bataille électorale.

Il revient au premier ministre de décider de ces questions. Cela lui appartient en tant que chef du Parti libéral du Canada. Mais cela va me faire plaisir de contribuer comme toujours à aider les collègues et à bien positionner notre équipe.

François-Philippe Champagne, ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, en entrevue

M. Champagne a toutefois donné toutes les indications qu’il est prêt à relever ce défi crucial pour l’avenir du gouvernement Trudeau.

« Chaque fois que le premier ministre m’a demandé de relever un défi, j’ai toujours répondu présent », a-t-il souligné.

Quant à la question de l’urne du prochain scrutin, il a déjà une idée en tête.

« La grande question pour moi sera la suivante : dans quel genre de société veut-on vivre ? Je crois que c’est ce qui va revenir à l’avant-plan. On tient bien des choses pour acquises. Mais dans une démocratie, ce que l’on a aujourd’hui n’est pas forcément ce que l’on aura demain. Les gens, quand ils vont voter, devront se demander dans quel Canada ils veulent vivre dans les prochaines années. Ce sera pour moi la question fondamentale durant la prochaine campagne. »

Le militant libéral de longue date Serge Paquette sera l’autre coprésident de la campagne libérale au Québec, selon nos informations.

En novembre dernier, M. Trudeau a annoncé que la ministre du Tourisme et ministre responsable de l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, Soraya Martinez Ferrada, et le député de Winnipeg-Sud, Terry Duguid, seraient les coprésidents du comité de la campagne nationale du Parti libéral du Canada.

Le ministre François-Philippe Champagne fait partie d’une liste de successeurs potentiels de Justin Trudeau. Les autres candidats évoqués sont la ministre des Finances, Chrystia Freeland, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, la présidente du Conseil du Trésor, Anita Anand, et l’ancien gouverneur de la Banque du Canada Mark Carney.

Des sondages stables au Québec

Depuis près d’un an, les sondages nationaux accordent une large avance au Parti conservateur de Pierre Poilievre. Cette avance oscille entre 15 et 20 points de pourcentage et se traduirait par l’élection d’un gouvernement conservateur majoritaire.

Si les appuis aux libéraux sont en chute dans les provinces atlantiques et en Ontario, ils sont plus ou moins stables au Québec.

Malgré tout, le Bloc québécois pourrait terminer la soirée électorale avec une poignée de sièges de plus aux dépens des libéraux en raison des luttes à trois que fait naître la hausse des appuis au Parti conservateur.

En dépit des vents de face qu’il affronte depuis quelque mois, Justin Trudeau maintient qu’il dirigera les troupes libérales au prochain scrutin. Pour l’heure, il n’existe pas de mouvement organisé au sein du Parti libéral pour le convaincre de passer le flambeau.

Le mois dernier, le gouvernement Trudeau a déposé un budget contenant de nouvelles dépenses pour accélérer la construction de logements et améliorer l’accès à la propriété dans l’espoir de reconquérir l’appui d’un segment important de l’électorat, soit les milléniaux et la génération Z. Jusqu’ici, les milliards de dollars de nouveaux investissements n’ont pas fait bouger l’aiguille des sondages.

En principe, les prochaines élections fédérales doivent avoir lieu en octobre 2025, soit dans environ 18 mois, si l’entente conclue entre le gouvernement libéral minoritaire et le Nouveau Parti démocratique tient le coup jusqu’à l’an prochain. En vertu de cette entente, signée il y a deux ans, le gouvernement Trudeau s’est engagé à mettre en œuvre certaines mesures chères au NPD, comme la création d’un programme national de soins dentaires et la mise sur pied d’un programme national d’assurance médicaments. En échange, le NPD s’engage à assurer la survie politique des libéraux à la Chambre des communes lors des votes de confiance.