(Montréal) Le premier ministre François Legault ne semble pas vouloir s’excuser au comité de suivi de la Commission Laurent, comme le lui demande Québec solidaire (QS). Il a associé jeudi matin ce comité au Parti québécois.

« Il n’y en a pas de comité de suivi officiel, a-t-il déclaré. Ni moi, ni le ministre, ni Régine Laurent, ont mis en place un comité de suivi. Ce sont des gens qui se sont autoproclamés comité de suivi, dont Martine Desjardins et Camil Bouchard qui sont, on le sait, proches du Parti québécois. »

M. Legault a réitéré que l’ex-commissaire Régine Laurent est satisfaite des progrès du gouvernement en s’appuyant sur sa lettre ouverte publiée dans les médias plus tôt cette semaine. « Moi, je fais confiance à Régine Laurent », répète-t-il.

Après des critiques de la part du comité de suivi de la Commission Laurent sur les actions du gouvernement en matière de protection de la jeunesse, M. Legault a discrédité mercredi le travail de ce comité. Québec solidaire lui demande de s’excuser.

La Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse (CSDEPJ) a publié mercredi matin son analyse de l’avancement des actions du gouvernement pour appliquer les recommandations du rapport Laurent, déposé il y a trois ans.

Le comité a fait état de lenteur, d’incohérences et de manque de transparence quant aux actions du gouvernement pour appliquer les pistes d’actions issues du rapport Laurent.

Selon le comité, une seule recommandation a été complétée par le ministère de la Santé et des Services sociaux et 30 % des sous-recommandations sont en cours. Le gouvernement affirme de son côté que 42 % des sous-recommandations sont en cours ou complétées.

Guillaume Cliche-Rivard, porte-parole de QS en matière de services sociaux, estime que M. Legault est « visiblement gêné par la note qu’il a reçue à son propre bulletin ».

En point de presse jeudi matin, M. Cliche-Rivard a souligné que le comité que M. Legault a attaqué mercredi est constitué d’une vingtaine d’experts. « Ce sont des experts qui suivent nos tout-petits, et aujourd’hui, je les comprendrais d’être furieux », a-t-il lâché.

« Avec tout le respect que je dois au premier ministre, je ne trouve pas que ça fait honneur à sa fonction, ce qu’il a dit hier au Salon bleu », a déploré le député solidaire.

M. Cliche-Rivard a également mis en lumière que cette semaine marque les cinq ans de la mort de la fillette de Granby et que les députés ont adopté à l’unanimité mardi une motion pour souligner ce triste anniversaire. « On s’était dit : “Plus jamais.” Et, le lendemain, le lendemain de ça, le [premier ministre] se lève en Chambre pour attaquer la crédibilité d’un comité d’experts qui défendent les enfants les plus vulnérables de notre société », a-t-il dénoncé.

Des visions différentes de la situation

Québec solidaire a demandé en Chambre au premier ministre de s’excuser et de reconnaître qu’il est allé trop loin.

Lors de la période de questions, M. Cliche-Rivard a rappelé que le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, avait salué la création du comité en 2022. « Tout ce qui peut et doit être fait dans l’intérêt des enfants est le bienvenu », a déclaré M. Cliche-Rivard en citant le ministre Carmant à l’époque.

Le député solidaire estime que le dénigrement de M. Legault à l’égard du comité « manque de considération pour cet important regroupement d’experts ».

Le ministre Carmant a aussi souligné que le comité n’avait pas été nommé par le gouvernement. « La personne que le premier ministre a mandatée […] c’est moi, comme élu [et] ministre responsable des Services sociaux, et je m’assure tous les jours qu’on avance », a affirmé M. Carmant.

Il a expliqué que les 251 sous-recommandations du rapport Laurent ont été divisées en trois phases, la première étant axée sur la prévention. La phase deux, « celle dans laquelle on est actuellement », consiste à modifier les pratiques de la DPJ, nommer un commissaire au bien-être et aux droits des enfants et améliorer la formation. La troisième phase concerne le processus interministériel, a-t-il précisé.

M. Cliche-Rivard est d’avis que le gouvernement n’en fait pas assez. Il a dénoncé que « des enfants sont placés dans des locaux qui ressemblent à des cellules de prison » et que des enfants sont agressés dans des milieux de vie. Il faisait notamment référence au récent scandale selon lequel un père d’accueil a agressé une fillette de la DPJ. « Mais évidemment, le ministre préfère dire que le comité se trompe », a désapprouvé M. Cliche-Rivard.

M. Carmant a répliqué en demandant à son adversaire s’il pense que Régine Laurent fait fausse route. Il a indiqué que le ministère est en train de travailler sur l’implantation d’un commissaire au bien-être et aux droits des enfants. Cette mesure fait partie du projet de loi 37 qui est pour l’instant mis sur pause le temps que le ministère consulte les Premières Nations.

Le ministre Carmant a partagé mercredi son intention de rencontrer le comité de suivi. M. Cliche-Rivard croit que M. Legault devrait se joindre à cette rencontre pour entendre ce que les experts ont à dire.

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.