(Saguenay) Avoir complété la révision du mandat de CBC et Radio-Canada d’ici aux prochaines élections fédérales est une échéance audacieuse aux yeux du député responsable de ce dossier dans les rangs bloquistes, Martin Champoux.

« C’est audacieux de penser que ça va se faire facilement. Ça ne se fera pas facilement », a dit l’élu à La Presse Canadienne au cours d’une entrevue accordée en marge de la retraite du caucus du Bloc québécois à Saguenay.

Dans un entretien de fin d’année, la ministre du Patrimoine, Pascale St-Onge, a dit viser cette date butoir afin de prémunir le radiodiffuseur public contre un éventuel changement de gouvernement à Ottawa.

M. Champoux se montre aussi déterminé à ce que le dossier soit « réglé » d’ici à ce que les Canadiens soient rappelés aux urnes, mais il ne croit pas que ce sera une mince affaire.

« Parce que si les conservateurs prennent le pouvoir, je ne pense pas que les décisions de ce gouvernement-là vont aller dans le sens de ce que nous on voit comme nécessité d’avoir un diffuseur public en santé », a-t-il poursuivi.

Or, il s’attend à ce que la vision des conservateurs, qu’il présente comme étant aux antipodes de celle des bloquistes, nuise à l’atteinte de cette échéance. Il donne en exemple la façon dont les troupes de Pierre Poilievre ont exprimé leur opposition à C-11, dont l’adoption vise la réforme de la Loi sur la radiodiffusion.

« Toutes les manœuvres possibles pour étirer le temps, pour bloquer les travaux, pour “filibuster” en comité, les multiples amendements qu’on devait débattre plus ou moins longtemps », a-t-il énuméré.

Les conservateurs ont promis de supprimer le financement de CBC et de transformer son siège social de Toronto en logements. Les conservateurs promettent par ailleurs de maintenir la programmation en français de Radio-Canada.

M. Champoux laisse entendre qu’il ne peut être pris pour acquis que le prochain scrutin fédéral aura nécessairement lieu à l’automne 2025.

« Je trouve que c’est un pari qui est quand même assez audacieux de se donner comme objectif de régler la question du mandat de Radio-Canada dans un avenir aussi incertain. »

Le porte-parole bloquiste en matière de Patrimoine se donne pour priorité d’assurer, au cours de la révision du mandat du diffuseur public, une meilleure protection de l’information régionale.

« Parce que, présentement, j’ai l’impression que tout ce qui se fait comme restrictions budgétaires ou comme coupes budgétaires se fait au détriment de l’information en région, a-t-il dit. La couverture médiatique se fait de plus en plus à partir de régions plus grandes que les régions. »

Il estime aussi que la question du financement de la société d’État doit faire partie de la discussion.

« Est-ce qu’on permet encore à Radio-Canada de participer autant à au partage de la tarte publicitaire ? Est-ce qu’on laisse Radio-Canada continuer de charger des abonnements pour des services pour lesquels les gens ont l’impression de déjà payer à travers leurs taxes et impôts ? » s’est-il interrogé tout haut.

Le rapport annuel de CBC/Radio-Canada pour l’exercice 2022-2023 montre que le diffuseur public a reçu près de 1,3 milliard de financement gouvernemental, et tiré 515 millions d’autres revenus tels que la publicité.

Au début décembre, la présidente et directrice générale du diffuseur public, Catherine Tait, a annoncé la suppression à venir de 600 emplois et l’abolition de 200 postes vacants, soit près de 10 % des effectifs.

Mme Tait est attendue mardi prochain devant les élus du comité du Patrimoine, dont M. Champoux fait partie.

En annonçant ses compressions, la haute direction du diffuseur disait prendre en compte que son financement public serait amputé de 3 %, soit environ les économies qu’Ottawa disait viser dans son dernier budget de la part de certains ministères et sociétés d’État.

La ministre St-Onge a précisé qu’il n’y avait pas encore eu de décision à savoir si un tel effort budgétaire sera demandé à CBC et Radio-Canada.

M. Champoux s’est dit ouvert à une exemption à leur égard, mais il croit qu’« en contrepartie », le diffuseur public devrait se montrer prêt à des compromis, comme de renoncer à sa part des 100 millions promis par Google à un collectif de médias, plafonnée à 7 %.

« J’aimerais ça que Radio-Canada Canada arrive en disant » ben, regardez, on comprend que la réalité est beaucoup plus grave dans des plus petits médias qui auraient besoin de se partager le sept millions qui ne fera pas grand-chose pour nous » », a-t-il soutenu.

Les 100 millions doivent être versés par Google aux médias dans le cadre de la Loi sur les nouvelles en ligne.