(Québec) Le ministre Christian Dubé jette du lest après avoir essuyé de vives critiques des médecins et de leur ordre professionnel. Il a proposé mardi de nombreux aménagements pour redonner du poids à leur voix dans sa vaste réforme en santé. Des modifications qui demeurent « superficielles » aux yeux des médecins spécialistes.

Le ministre de la Santé a présenté comme prévu mardi une liasse de 150 amendements pour ajuster son imposant projet de loi 15, qui vise à rendre plus efficace le réseau de la santé et des services sociaux. Les parlementaires ont repris lundi l’étude détaillée du texte législatif qui comporte pas moins de 1200 articles. Six jours de travaux – avant la rentrée parlementaire – sont à l’horaire jusqu’au 29 août.

Au centre des amendements proposés : une plus grande implication des médecins dans l’organisation des soins et gestion des ressources. C’est une réponse directe aux griefs des médecins spécialistes, des omnipraticiens et du Collège des médecins qui reprochent au ministre Dubé de les « écarter » des lieux décisionnels et de faire « disparaitre » la notion de cogestion médico-administrative.

« Certains éléments de la gouvernance clinique ont été intégrés comme le principe de cogestion », admet le président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ), le DVincent Oliva.

Par contre, la FMSQ est loin d’être satisfaite des aménagements touchant les conseils des médecins, dentistes et pharmaciens (CMDP) – cette structure qui contrôle toute l’activité professionnelle des médecins d’un établissement. « Les responsabilités du CMDP ont fait l’objet de modifications superficielles alors que ces derniers sont les chiens de garde de la qualité des soins prodigués aux patients », déplore le DOliva.

Or, le texte législatif sera amendé à plusieurs endroits pour ajouter l’obligation pour le PDG ou le directeur médical (une fonction qui serait créée avec la réforme) de consulter les CMDP. Par exemple, ces comités retrouveront un pouvoir de consultation pour l’octroi des statuts et privilèges des médecins qui exercent dans un établissement – un élément central de leurs pouvoirs actuels. Il en va de même pour une suspension.

Les CMDP auront aussi une voix lorsqu’il sera question de nommer le nouveau directeur médical – de qui ils relèveront en partie. Le PDG devra aussi les consulter avant d’approuver les règles d’utilisation des ressources médicales dans l’établissement.

La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) accueille plus positivement les aménagements proposés par le ministre. « C’est un pas dans la bonne direction et je dirais qu’il y a certains assouplissements », a lancé à chaud le président, le DMarc-André Amyot.

« Les CMDP, on leur avait enlevé presque toutes leurs responsabilités, leurs pouvoirs. Maintenant, on leur en redonne un peu », admet le DAmyot.

En marge des négos

Il faut dire que ces aménagements sont déposés alors qu’un bras de fer se profile entre Québec et les médecins spécialistes. La réforme Dubé vient serrer la vis aux spécialistes qui seront soumis, à l’instar des omnipraticiens, à des « activités médicales particulières » comme prendre en charge plus de patients et couvrir des quarts de garde défavorables.

À ce sujet, le ministre a fait savoir lundi que les discussions avec la Fédération des médecins spécialistes ont progressé au cours des derniers jours. Les amendements présentés mardi ne concernent d’ailleurs pas la liste des AMP auxquelles seront soumis les spécialistes. La FMSQ favorise une entente négociée plutôt que les AMP soient définies dans le projet de loi.

En outre, les amendements présentés par le ministre (ils doivent être étudiés puis adoptés en commission parlementaire où la CAQ est majoritaire) touchent la représentation des comités d’usagers. M. Dubé donne aussi de nouveaux pouvoirs à la Vérificatrice générale du Québec, qui pourra faire rapport sur les organismes privés de santé, comme les entreprises ambulancières et les cliniques médicales spécialisées.