En quittant la vie politique, l’ex-députée péquiste Véronique Hivon disait vouloir vivre « la page blanche ». Celle qui est connue des Québécois pour son rôle dans des progrès sociaux marquants, notamment en ce qui concerne les soins de fin de vie, n’aura finalement pas chômé longtemps. La Presse l’a reçue en entrevue à l’aube d’un nouveau mandat qu’elle commence à l’Université de Montréal.

Quand Véronique Hivon a annoncé son départ de la politique au terme de quatre mandats à titre de députée de Joliette, sa rivale libérale Marwah Rizqy, qui défendait comme elle les dossiers en éducation, a déclaré que « les universités en science politique devraient enseigner la méthode hivoniste : l’art de convaincre sans rabaisser son adversaire ». Ce souhait n’aura finalement pas pris de temps à se réaliser.

Qui est Véronique Hivon ?

  • Née à Joliette le 14 mars 1970
  • Après sa formation en droit et en science politique, en 1996, elle est devenue directrice adjointe d’un centre de recherche en droit privé et comparé, puis conseillère au conseil exécutif du Secrétariat aux relations intergouvernementales canadiennes.
  • Elle a ensuite travaillé comme avocate au ministère de la Justice du Québec de 2006 à 2008.
  • Candidate défaite du Parti québécois dans la circonscription de Jean-Talon en 2007, elle est devenue rapporteure générale adjointe du Groupe pour la souveraineté au sein de son parti.
  • Elle a été élue députée de Joliette en 2008, poste qu’elle a conservé d’élection en élection jusqu’à son départ de la politique, en octobre dernier.

Détendue et surtout « extrêmement reconnaissante des expériences extraordinaires vécues en politique », Véronique Hivon annonce ses nouveaux défis professionnels avec la fébrilité d’un premier jour d’école. Elle devient professeure invitée au département de science politique de l’Université de Montréal et « experte en résidence » de la toute nouvelle Maison des affaires publiques et internationales.

« Ce double rôle va me permettre d’approfondir des enjeux sociaux et de partager l’expérience que j’estime très riche de mes 14 années en politique », affirme-t-elle en prévenant qu’elle sera à l’université, comme elle était en politique active, d’une « grande intensité ».

Détentrice d’un baccalauréat en droit de l’Université McGill et d’une maîtrise en analyse et planification de politiques sociales de la London School of Economics and Political Science, au Royaume-Uni, c’est ancrée au Québec et branchée sur la francophonie que Véronique Hivon souhaite poursuivre sa carrière.

La Maison des affaires publiques et internationales, dont le recteur de l’Université de Montréal, Daniel Jutras, lui a vanté les mérites, a pour mission de réunir des chercheurs de plusieurs disciplines et de les mettre en relation avec les besoins vécus sur le terrain.

« Cette nouvelle entité a vraiment pour vocation de réunir la théorie et la pratique de la manière la plus concrète possible, ancrée dans des projets concrets. L’idée est vraiment de devenir un incubateur de politiques publiques », explique Mme Hivon, faisant un lien avec les jeunes pousses (ou start-up en anglais) du monde des affaires.

Déjà, l’ex-députée réfléchit à un premier projet de recherche. Elle souhaite approfondir comment les jeunes pourraient obtenir de l’aide à se loger, en pleine crise du logement, tout en brisant l’isolement des personnes aînées en cohabitant avec eux chez eux.

Pour ce projet comme pour les autres, la Maison des affaires publiques et internationales a l’ambition d’offrir des politiques « clés en main » aux décideurs, tant au fédéral qu’au provincial ou au municipal, mais aussi dans les organismes de la société civile.

Retrouver le temps

Quand elle a quitté la politique après 14 ans sur les banquettes du Salon bleu, Véronique Hivon avait, comme de nombreux anciens élus, la tête qui tournait.

Un des constats que j’ai faits quand j’étais en politique et qui m’a frappée, c’est comment tout va toujours très vite et comment on ne se tourne pas autant qu’on le devrait vers la recherche et tous ces chercheurs qui ont des connaissances poussées et une expertise extraordinaire à offrir. Leurs travaux ne trouvent pas toujours leur chemin jusqu’aux décideurs.

Véronique Hivon

« C’est tellement intense quand tu es en politique. Tu vis des choses formidables, tu fais des rencontres marquantes, tu mènes des combats significatifs, mais le rythme est tellement fou que tu ne vis pas pleinement le sens de ce que tu es en train de faire. C’est ce que les derniers mois m’ont permis de faire », ajoute l’ancienne députée.

Comme professeure invitée à l’Université de Montréal, Mme Hivon donnera aux étudiants à la maîtrise des cours axés sur la pratique du travail politique, des processus d’élaboration des politiques et du fonctionnement de la fonction publique, des cabinets ministériels et du processus législatif.

Où a-t-on le plus de pouvoir ?

Ceux qui rêvent d’avoir un impact sur leur société en quittant l’université devraient-ils se tourner vers la politique partisane, poursuivre en recherche ou prendre d’assaut les causes défendues par les mouvements sociaux ?

En réponse à cette question qui la fait rire, car elle se l’est posée elle-même avant d’occuper des rôles dans tous ces créneaux, Véronique Hivon suggère aux étudiants de trouver d’abord leur vocation.

« Ce qui va faire que tu seras plus ou moins influent, que tu vas réussir à faire la différence, c’est quand tu es sur ton X. À l’endroit où tu vas te sentir le mieux pour accomplir des changements », estime-t-elle.

« Pour moi, ce qui a fait la plus grande différence pour amener des changements, c’est d’être restée connectée à ce qui m’anime et à mes objectifs. »