(Ottawa) Le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, promet de tenir une enquête publique sur l’ingérence étrangère s’il remporte les prochaines élections fédérales.

M. Poilievre et le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, ont continué mercredi à tirer à boulets rouges sur le rapporteur spécial David Johnston, qui a conclu dans un rapport publié 24 heures plus tôt qu’une enquête publique n’est pas nécessaire pour faire la lumière sur les activités d’ingérence de la Chine.

Ils ont d’ailleurs de nouveau mis en doute son impartialité, rappelant les liens entre M. Johnston et la famille Trudeau ainsi que les liens entre l’ancien gouverneur général et la Fondation Trudeau.

Parallèment, les deux leaders ont aussi intensifié la pression sur le chef du NPD, Jagmeet Singh, pour qu’il cesse d’appuyer les libéraux minoritaires à la Chambre des communes durant les votes de confiance si le gouvernement Trudeau continue d’écarter une enquête publique.

Après avoir épluché des rapports de renseignements et avoir rencontré des dirigeants des agences de sécurité, le premier ministre et certains de ses ministres ainsi que des hauts fonctionnaires, M. Johnston a affirmé qu’une enquête publique serait un exercice peu utile compte tenu de la nature délicate des renseignements qui ne pourraient pas être rendus publics. Le premier ministre Justin Trudeau a accepté les conclusions de M. Johnston.

Mais selon Pierre Poilievre, le travail effectué par David Johnston n’avait qu’un seul but : lancer une bouée de sauvetage au premier ministre Justin Trudeau et à son gouvernement, malmenés à la Chambre des communes depuis des mois en raison des révélations entourant l’ingérence de la Chine dans les élections fédérales de 2019 et 2021.

« Justin Trudeau a quelque chose à cacher. C’est évident », a lancé tout de go le chef conservateur durant une conférence de presse à Toronto.

« Nous savons que Pékin s’est ingéré dans nos élections pas une fois, mais deux fois pour aider Justin Trudeau à se faire élire. Il fait tout ce que Pékin désire et le régime communiste l’aide à rester au pouvoir. […] Je vais protéger les Canadiens. Je vais créer un registre des agents d’influence étrangers et je vais lancer une enquête publique pour obtenir la vérité », a-t-il ajouté.

Il a précisé plus tard qu’il confierait ce mandat à un juge ayant une expertise en matière de sécurité nationale et de renseignements.

À Ottawa, le chef bloquiste Yves-François Blanchet a affirmé que seule la tenue d’une enquête publique permettra de faire toute la lumière sur les multiples facettes de l’ingérence chinoise.

« Le travail le rapporteur est assez étroit dans son approche. Il ne mentionne pas les postes de police qui sont des outils structurés d’ingérence sur le territoire canadien. Il ne parle pas des investissements stratégiques tolérés. Il ne parle pas d’espionnage industriel. Il ne parle pas de financement de recherche au bénéfice d’une entreprise qui est interdite sur le territoire. Le dossier de la Fondation Trudeau est réglé. Tout va bien ! Il n’y en a pas d’enjeu à la Fondation Trudeau », a ironisé M. Blanchet.

Le chef bloquiste s’est aussi montré critique de certaines conclusions de M. Johnston, qui, selon lui, a distribué les blâmes aux médias, aux lanceurs d’alertes et aux hauts fonctionnaires pour la gestion et la communication des renseignements touchant la sécurité, mais n’a formulé aucun reproche à l’endroit du gouvernement Trudeau. « C’est irresponsable et je n’en crois pas un mot », a-t-il martelé.

M. Blanchet ne croit pas que M. Johnston ait l’indépendance et l’impartialité pour continuer le travail en tenant des audiences publiques sur les graves lacunes dans la gouvernance et les politiques en matière de sécurité nationale.

Le mandat de M. Johnston était de protéger Justin Trudeau, de protéger le Parti libéral du Canada, de protéger le secret en général et ce faisant il aura servi à protéger les abus de la Chine sur le territoire canadien.

le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet

Selon lui, le chef du NPD, Jagmeet Singh, doit s’interroger sur l’avenir de l’entente qu’il a conclue avec les libéraux. « Il faudrait couper le chauffage dans la chambre à coucher où les libéraux et le NPD se fréquentent pour qu’ils sortent chacun de leur bord deux minutes. Peut-être que le NPD viendrait à de meilleures dispositions. S’ils disent qu’ils veulent une enquête publique, est-ce qu’ils sont prêts à voter de façon contraignante pour ça ? », a-t-il lancé.

De passage à Winnipeg, le premier ministre Justin Trudeau s’est porté à la défense de David Johnston, rappelant ses longs états de service sous divers gouvernements.

« On a offert à tous les chefs d’opposition d’avoir la côte de sécurité nécessaire pour pouvoir regarder les renseignements sur lesquels les conclusions M. Johnston ont été fondées. M. Johnston est un ancien gouverneur général d’une intégrité reconnue. [...] Je pense que sur un enjeu aussi important que l’ingérence étrangère, les Canadiens méritent d’avoir des leaders qui prennent ça au sérieux et qui s’engagent sur la substance et non seulement juste la partisanerie et des attaques personnelles », a dit M. Trudeau.