(Ottawa) Le chef conservateur Pierre Poilievre a évité mardi de commenter directement les propos de son député Richard Martel qui a été critiqué par plusieurs pour avoir qualifié de « réfugiés illégaux » une femme salvadorienne et son fils arrivés au Canada par le chemin Roxham, en Montérégie.

Au cours d’une mêlée de presse sur la colline du Parlement, M. Poilievre a néanmoins souligné qu’il comprenait « pourquoi les gens veulent traverser au chemin Roxham », ce passage de fortune devenu au fil des ans un point d’entrée non officiel emprunté par de nombreux demandeurs d’asile.

« Ce sont des êtres humains. Je n’ai rien contre les personnes. Dans certains cas, elles sont des victimes aussi d’un système qui ne fonctionne vraiment pas », a dit le chef de parti.

Selon lui, le « problème » vient de « l’incompétence de Justin Trudeau qui empêche les immigrants légitimes [de voir leur dossier] traité de façon vite et juste ».

Il a assuré que s’il devenait premier ministre, son gouvernement serait « compétent pour régler ces problèmes -là », ne manquant pas de mentionner au passage que sa femme, qui est d’origine vénézuélienne, a immigré au Canada.

M. Poilievre a aussi abordé sa vision de la renégociation de l’Entente sur les tiers pays sûrs, qui est au cœur des passages de migrants par le chemin Roxham.

« On devrait trouver une façon, en renégociant […] avec les États-Unis, pour fermer le chemin Roxham et pour retourner à un système où les gens arrivent aux portes d’entrée légales, a-t-il soutenu. Moi, je crois que c’est plus humanitaire et c’est plus juste surtout pour les gens qui attendent durant une longue période de temps pour arriver ici au Canada. »

Le député conservateur Richard Martel a fait la manchette, peu de temps avant les Fêtes, puisqu’il a indiqué à Radio-Canada qu’il avait refusé d’aider des ressortissants salvadoriens installés dans sa circonscription parce qu’ils sont, selon lui, des « réfugiés illégaux ».

Leticia Cruz et son fils Raul étaient menacés d’expulsion. Ils ont finalement pu rester au pays après l’intervention du député bloquiste Mario Simard, puis du ministre l’Immigration Sean Fraser.

« On parle de réfugiés illégaux, qui ont passé par le chemin Roxham, pendant qu’il y a des réfugiés légaux qui attendent ! Ce cas-là, c’est des réfugiés illégaux. Moi, je n’embarque pas là-dedans », a dit M. Martel dans un entretien accordé à la fin décembre au diffuseur public.

La Presse Canadienne avait alors demandé d’avoir une entrevue avec M. Martel, requête laissée sans réponse.

La formation politique avait toutefois fourni une déclaration écrite attribuable au lieutenant conservateur pour le Québec, Pierre Paul-Hus. « Nos députés aident les gens de tous horizons et soutiennent les Canadiens qui sont laissés pour compte par le gouvernement Trudeau tout en défendant un système d’immigration juste et compatissant », pouvait-on y lire.

Dans une entrevue diffusée ce lundi sur les ondes de Radio-Canada au Saguenay–Lac-Saint-Jean, M. Martel a affirmé qu’il « referai[t] probablement la même chose » si un autre dossier qui serait similaire à celui de la famille Cruz venait à se retrouver entre ses mains.

« Mais ça, c’est un dossier qui était complexe et il y avait des raisons pour lesquelles je vous dis que je ne l’ai pas pris », a-t-il répondu à l’animatrice qui menait l’entrevue. Il a soutenu qu’au moment de choisir de refuser d’aider la famille Cruz, il savait que le Bloc québécois ferait autrement.

« Alors ils l’ont pris et ils l’ont arrangé, le dossier. Alors c’est comme ça. C’est juste une question de valeurs aussi et de dossiers. Alors, je ne rentre pas là-dedans », a-t-il poursuivi.

Il a insisté, au fil des questions, sur le fait qu’il considérait que le dossier était « clos » en ce qui le concerne.

Le beau-frère de Leticia Cruz, José Nicola Lopez, avait indiqué en entrevue avec La Presse Canadienne qu’il considérait que M. Martel devrait s’excuser pour ses commentaires « offensants » qui relèvent, à ses yeux, de l’« ignorance ».