(Québec) Les partis d’opposition estiment que le retour en politique pour la Coalition avenir Québec (CAQ) de l’ex-ministre péquiste Bernard Drainville, qui animait jusqu’à tout récemment une émission de radio au 98,5 FM à Montréal, est la preuve qu’il est un opportuniste avant tout.

M. Drainville, connu en politique pour ses discours passionnés en faveur de l’indépendance du Québec et pour son implication dans la défunte Charte des valeurs québécoises du Parti québécois (PQ), a confirmé mardi qu’il sera candidat caquiste dans la circonscription de Lévis, sur la Rive-Sud de Québec.

« Le Bernard Drainville que j’ai connu, le Bernard Drainville que beaucoup de Québécois connaissent, là où il était le meilleur, là où il avait les plus grandes qualités, c’était en tant qu’indépendantiste convaincu et indépendantiste convaincant. […] S’il met de côté cette valeur-là aujourd’hui, je me demande quelle valeur va-t-il pousser ? Est-ce qu’il nous revient avec une Charte des valeurs 2,0 ou est-ce qu’il est là simplement par opportunité politique ? », a questionné mardi le leader de l’opposition officielle à Québec, le député libéral André Fortin.

En point de presse, M. Fortin a cité d’anciennes déclarations où M. Drainville affichait fièrement ses convictions indépendantistes. « Nous n’avons pas le luxe de la résignation, de l’abandon, de l’abdication, peu importe le cadre politique. Nous, indépendantistes, avons duré sous toutes formes, il faut durer encore », écrivait par exemple l’ancien ministre péquiste, aujourd’hui caquiste.

« L’arrivée de Bernard Drainville à la CAQ, c’est la confirmation que la stratégie électorale de François Legault, c’est de faire campagne sur l’immigration et les signes religieux », estime pour sa part le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois.

« Les gens parlent beaucoup des changements de convictions de M. Drainville. Je trouve qu’on devrait parler plus de ce qui n’a pas changé. M. Drainville, c’est le rédacteur de la Charte des valeurs, un des évènements les plus divisifs de l’histoire politique récente au Québec. […] Maintenant, il s’en va en politique avec un premier ministre qui veut faire campagne sur les signes religieux et l’immigration. Ça, c’est les priorités du tandem Legault-Drainville », a-t-il poursuivi.

Quel avenir pour les oppositions ?

L’arrivée d’un indépendantiste autrefois convaincu comme Bernard Drainville au sein de la CAQ, qui se dit un parti nationaliste et fédéraliste, est une mauvaise nouvelle pour le PQ, qui récolte pour l’instant des sondages désastreux dans les intentions de vote.

« Je n’ai pas travaillé personnellement avec Bernard Drainville, mais je le connais comme étant un fervent indépendantiste, et, essentiellement, quelqu’un qui voulait devenir chef du Parti québécois et devenir premier ministre », a déclaré le chef parlementaire péquiste Joël Arseneau.

À quelques mois de l’élection, aucune formation politique à Québec ne concurrence en ce moment la CAQ dans les intentions de vote, selon les plus récents sondages. En cette dernière semaine de la session parlementaire, tant le Parti libéral, Québec solidaire que le Parti québécois mettront de l’avant le bilan caquiste afin de préparer le terrain pour la campagne électorale, qui sera déclenchée à la fin de l’été.

« L’environnement, c’est le talon d’Achille de François Legault. […] Je vais travailler très fort pour que l’environnement soit l’épine dans le pied de François Legault tout l’été et tout l’automne », a affirmé Gabriel Nadeau-Dubois.

« [François Legault] pense que personne n’est assez bon sur la Rive-Sud de Québec pour faire partie de son équipe et il parachute Bernard Drainville à Lévis. L’arrogance a atteint un tel niveau à la CAQ que M. Legault semble distribuer les limousines avant même que les électeurs se prononcent », a déploré le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime.

Les libéraux se disent prêts

La cheffe du Parti libéral, Dominique Anglade, affirme de son côté que ses militants sont prêts pour un été électoral qui sera long, alors que sa formation politique n’est pas parvenue à faire bouger l’aiguille électorale ce printemps. Son parti dévoilera ce week-end sa plateforme électorale lors d’un conseil général à Montréal.

« Je pense que les troupes sont fouettées, je pense que les troupes savent très bien qu’on s’en va dans une campagne électorale où il va falloir aller défendre les valeurs du Parti libéral, aller défendre aussi le fédéralisme, parce que, visiblement, on va être les seuls à le faire avec les différents partis qui se retrouvent autour de là », a-t-elle dit.

« Il y a quatre ans, on a subi […] une défaite cinglante. Ce qu’on a fait, c’est qu’on s’est retroussé les manches et on a reconstitué le parti sur la base du vœu des militants d’axer vers l’indépendance. On a aussi élu un nouveau chef. On a également revu les statuts, on a adopté un projet national. On est en train de mettre la dernière main à une plateforme électorale, et on aura 125 candidats aux prochaines élections », a affirmé Joël Arseneau du Parti québécois.