Le ministre des Transports, François Bonnardel, ne regrette pas d’avoir qualifié la densification urbaine de « mode », malgré la réaction mitigée qu’a causée sa sortie dans le milieu municipal. Il juge que si certaines familles se « retrouvent » dans des milieux densifiés, d’autres préfèrent au contraire s’en éloigner.

« Encore une fois, c’est un équilibre à trouver », a répondu le ministre caquiste lundi, en mêlée de presse, jugeant que la densification des centres urbains ne plaît pas à tous. « Il y a des familles qui s’y retrouvent, et il y en a d’autres qui ne s’y retrouvent pas », a-t-il dit, rappelant que des « mécanismes » existent justement au gouvernement pour « autoriser ou non l’augmentation du périmètre urbain ».

Il réagissait ainsi à la sortie d’une nouvelle et jeune garde municipale, qui a livré lundi dans La Presse un message pour le gouvernement Legault : la densification urbaine n’est pas « une mode », comme l’avait dit le ministre Bonnardel, mais plutôt une façon incontournable de préserver le territoire et de freiner les changements climatiques.

« Je suis qui, moi, pour dire à une jeune famille : vu que la mode est à la densification, tu vas aller vivre dans une tour de 12 étages ? », avait lancé M. Bonnardel.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Catherine Fournier, mairesse de Longueuil

À Longueuil, la mairesse Catherine Fournier a mal reçu son commentaire. « Quand on a entendu ça dans le milieu municipal, ça a causé une certaine commotion. Au contraire, on n’a pas le choix d’aller là. Ce n’est pas une mode, la densification », a affirmé la jeune femme de 30 ans, qui dit avoir des attentes « très élevées » en vue du dépôt de la Politique nationale d’architecture et d’aménagement du territoire (PNAAT), pilotée par la ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest.

Une expression « absolument » appropriée

Questionné par La Presse lundi à sa sortie d’un dîner-conférence organisé par Trajectoire Québec à Montréal, le ministre Bonnardel a affirmé que le mot « mode » était « absolument » approprié dans le contexte. « La densification, elle est là, je ne l’ai pas niée, s’est-il néanmoins défendu. Elle existe et elle existera encore pendant un certain nombre de temps. »

Demeurant prudent, il a toutefois ajouté que « cette particularité de densification, versus l’augmentation ou non possible des périmètres urbains que certaines municipalités pourraient souhaiter, est encadrée » par le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH). « Je vais laisser ça dans la cour de ma collègue [Andrée Laforest] », a-t-il dit.

Au cabinet de Mme Laforest, on indique « très bien comprendre les préoccupations et les attentes des nouveaux élus municipaux ». « Je présenterai une vision claire sur toute la question de l’aménagement de notre territoire. J’ai la ferme intention de mener à bien cette stratégie », a d’ailleurs commenté la ministre lundi, en parlant de la PNAAT.

« On le voit avec le DIX30, on le voit à Québec, le long du boulevard Guillaume-Couture à Lévis, et on va le voir le long du tramway : le long de ces axes de transport, il est normal qu’on densifie », a toutefois reconnu François Bonnardel.

« Vous avez des municipalités qui, aujourd’hui, n’ont plus de terrains pour bâtir des plex. C’est donc normal de voir le long des grands axes routiers – et je donnais souvent l’exemple de la 30 – des tours qui se bâtissent pour des gens qui veulent y habiter. Ils veulent bénéficier d’avoir près d’eux toutes les ressources disponibles », a plus tard ajouté M. Bonnardel, répétant toutefois que ce type de développement « répond à une partie de la population, mais pas à d’autres ».

Miser sur les voies réservées

Le ministre des Transports a aussi été questionné lundi sur le rapport du comité d’experts chargé de conseiller le gouvernement en matière de changements climatiques, qui recommande de mettre sur pause toute autorisation de nouveaux projets augmentant la capacité autoroutière.

« Il faut comprendre que 80 % de nos sommes, présentement, sont investies dans le maintien d’actifs, et 20 % est en bonification. Je l’ai toujours dit : s’il faut agrandir ou élargir certaines routes, les voies réservées sont extrêmement importantes pour augmenter l’attractivité du transport collectif », a dit M. Bonnardel.

Il affirme que Québec « fait la même chose » avec le troisième lien et le tramway à Québec. « On aura, et je le souhaite, un tramway aussi du côté de Gatineau », a-t-il conclu, parlant d’une balance à opérer entre l’attractivité des transports en commun et la fluidité du réseau routier.

Avec Charles Lecavalier, La Presse

Camionneurs : « Je comprends leur problème »

La venue du ministre Bonnardel à Montréal survenait alors que dans plusieurs régions, des manifestations de l’Association nationale des camionneurs artisans avaient lieu, notamment devant le parlement à Québec, pour dénoncer que les tarifs de transport consentis par le gouvernement du Québec sont basés sur un prix du carburant dépassé. « Je comprends leur problème », a dit le ministre, en faisant valoir qu’avec l’inflation, « le coût du carburant est extrêmement élevé présentement ». « On est en discussions avec [l’Association] depuis quelques jours. On va régler le problème », a-t-il indiqué.