François Legault s’oppose à l’intervention du gouvernement fédéral pour sauver le caribou forestier et craint qu’une protection trop sévère nuise aux emplois dans le domaine de la foresterie, une « vieille manière de réfléchir », selon les partis de l’opposition.

Le ministre fédéral de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, a lancé un ultimatum au ministre québécois des Forêts, de la Faune et des Parcs, Pierre Dufour, dans une lettre obtenue par La Presse. Si Ottawa ne reçoit pas « d’ici le 20 avril » des informations sur la mise en place par Québec de nouvelles mesures pour assurer la protection du caribou et de son habitat, le gouvernement fédéral prévoit en imposer par décret.

Ottawa pourrait ainsi mettre près de 35 000 km2 du territoire forestier québécois à l’abri des tronçonneuses de l’industrie forestière, selon une estimation de la Société pour la nature et les parcs.

Mais le gouvernement Legault n’est pas prêt à agir : en fait, il n’est même pas certain que des « gestes additionnels » doivent être faits pour rétablir la population de cette espèce menacée. Accusé par les partis de l’opposition de traîner les pieds, M. Legault estime que, malgré un nombre important d’études confirmant les conséquences de l’industrie forestière sur le caribou, il faut tout de même attendre les conclusions de la Commission indépendante sur les caribous forestiers et montagnards avant d’agir.

« Il faut avoir un équilibre entre sauver le caribou et protéger des emplois importants dans certaines régions du Québec », a-t-il affirmé. Il a dénoncé ce qu’il considère comme un empiétement du gouvernement fédéral dans un « champ de compétence du Québec ». Il s’en est pris au Parti libéral du Canada, un « parti très centralisateur qui veut se mêler de santé, de la loi 21, de plein de dossiers qui ne sont pas de sa compétence ». À son avis, les Québécois sont derrière lui dans ce combat et souhaitent « un Québec plus autonome ».

« Faux dilemme », selon QS

À Québec, les partis de l’opposition ont critiqué la Coalition avenir Québec. Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, estime qu’opposer les emplois dans l’industrie et la sauvegarde du caribou est un « faux dilemme » et repose sur de « vieilles manières de réfléchir ». « Ce n’est pas une question d’emplois. On peut protéger le caribou forestier et s’assurer de garder les emplois dans l’industrie forestière », a-t-il dit.

La cheffe du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade, est du même avis. « On est capable de faire les deux. Puis je m’excuse là-dessus, mais la question du caribou forestier, le Québec traîne les pieds depuis longtemps », a-t-elle dit.

De son côté, le chef parlementaire péquiste Joël Arseneau croit que « ce n’est jamais une bonne chose de voir le fédéral intervenir dans les champs de compétence du gouvernement du Québec », mais que le gouvernement Legault a ouvert la porte à cet ultimatum en reportant constamment les « échéances » pour protéger cette espèce en péril. « Quel aveu d’échec incroyable du ministre Dufour et du gouvernement du Québec », a-t-il pesté.