(Québec) L’hypothèse d’un retour de Jean Charest sur la scène politique fédérale secoue son ancienne formation politique à Québec. Au terme d’une journée où son legs a suscité des débats enflammés, mardi, la cheffe libérale Dominique Anglade a prévenu ses adversaires : « Il y a des chefs qui se sont essuyé les pieds sur le Parti libéral du Québec et ça, je ne l’accepterai jamais. »

Plus tôt en journée, tant le gouvernement Legault que le Parti québécois et Québec solidaire ont associé l’héritage de l’ancien premier ministre libéral à des problèmes d’éthique et à de la corruption. Selon le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, Éric Caire, « au niveau de l’éthique, [Jean Charest], ça n’a pas été un modèle ». Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a affirmé à son tour que l’héritage de Jean Charest est d’avoir « d’une certaine manière normalisé la corruption en la banalisant ».

« L’impunité dans une démocratie, c’est la pire chose. S’il n’y a pas de conséquences, s’il n’y a pas de punition lorsqu’on corrompt le ministère des Transports et qu’on fait de la politique en finançant son parti en échange de contrats gonflés, s’il n’y a pas de punition pour ça […], c’est triste », a-t-il ajouté.

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Jean Charest

Anglade défend son héritage

Après avoir pris ses distances en affirmant mardi matin qu’elle ne voulait pas « s’immiscer dans une course au leadership » d’un autre parti, Dominique Anglade est sortie de sa réserve en soirée pour défendre le bilan de son prédécesseur en entrevue avec La Presse.

« Je pense que Jean Charest a accompli de grandes choses », a-t-elle dit, citant la parité au Conseil des ministres, la création du Conseil de la fédération ou du Fonds des générations, entre autres.

« Le Parti libéral du Québec, c’est plus de 150 ans d’histoire et une énorme contribution à l’avancée du Québec. Les propos qui ont été tenus n’avaient pas leur place », a-t-elle ajouté.

La doyenne du parti, Lise Thériault (qui a récemment annoncé qu’elle quittait la vie politique au terme de son mandat), a ajouté que les politiciens qui aspirent à gouverner le Québec ont la responsabilité de « faire en sorte que les citoyens croient que les politiciens sont là pour faire de belles et grandes choses ».

« Quand je les ai entendus dire ce qu’ils ont dit aujourd’hui, j’ai eu le poil sur les bras qui m’a frisé. Je ne trouve pas ça digne d’un chef de parti [d’entretenir] un mythe par rapport à la corruption qui n’a pas été prouvée et avérée », a dit Mme Thériault.

Nadeau-Dubois perçoit un malaise

Le porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a affirmé à son tour que le « malaise » de Mme Anglade concernant le retour de Jean Charest en politique était « palpable », mardi.

« L’héritage de Jean Charest, c’est une démocratie affaiblie par la corruption. C’est un territoire ravagé en matière d’environnement. C’est un retard historique dans notre lutte contre les changements climatiques et ce sont des services publics en ruine », a-t-il dit.

Jean Charest, qui a été premier ministre du Québec avec le Parti libéral de 2003 à 2012, a aussi été chef de l’ancien Parti progressiste-conservateur dans les années 1990 sur la scène fédérale. Il pourrait annoncer son intention dans les prochains jours de se présenter dans la course à la succession de l’ancien chef conservateur Erin O’Toole.

Sur le plan judiciaire, M. Charest poursuit également le gouvernement du Québec pour violation de sa vie privée dans la foulée de fuites concernant l’enquête de l’Unité permanente anticorruption sur le financement du Parti libéral du Québec.