(Québec ) Dominique Anglade met fin à sa participation aux appels hebdomadaires entre les chefs des partis de l’opposition et le premier ministre. La cheffe libérale se sent « instrumentalisée » par François Legault, qu’elle accuse de faire « semblant de collaborer ». Le cabinet du principal intéressé lui rappelle que « les absents ont toujours tort ».

La cheffe de l’opposition officielle a confirmé à La Presse qu’elle ne participerait pas à la rencontre virtuelle de ce vendredi entre les leaders des partis de l’opposition et François Legault. Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, sera aussi présent. Les élus avaient repris ce rendez-vous hebdomadaire la semaine dernière dans le contexte du tsunami Omicron. Or, selon Mme Anglade, ces entretiens téléphoniques sont organisés pour que le gouvernement « se donne bonne figure ».

« [M. Legault] fait semblant qu’il collabore en disant : "Je collabore, j’ai des rencontres", comme si c’était véritablement de la collaboration, mais ce n’est pas ça. La véritable collaboration, c’est que tu acceptes de débattre, de donner les informations et de les transmettre en temps opportun, que tu es transparent et que les gens puissent assister aux différents échanges », explique-t-elle, se disant « instrumentalisée ».

Ce à quoi le cabinet du premier ministre n’a pas tardé à répondre : « Les absents ont toujours tort. Mme Anglade veut utiliser la pandémie pour marquer des points politiques. C’est son choix. De notre côté, nous n’allons certainement pas entrer dans son jeu », a indiqué le porte-parole du premier ministre, Ewan Sauves.

« Par le passé, ces rencontres nous ont permis d’avoir une belle collaboration avec les oppositions, notamment avec son prédécesseur Pierre Arcand. C’est dommage que ce ne soit plus le cas. Nous continuerons d’être transparents et de fournir les avis et les informations derrière les décisions prises par le gouvernement et la Santé publique », a-t-on ajouté au cabinet de M. Legault.

La décision de Mme Anglade a provoqué une réaction partagée de ses vis-à-vis des oppositions, qui n’ont cependant pas emboîté le pas. Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, a soutenu ne pas être « dupe » affirmant que ces rencontres avec le premier ministre « sont un simulacre », mais a confirmé qu’il participera à l’appel de 15 h pour continuer de questionner le gouvernement sur la pandémie.

Le chef parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a aussi indiqué qu’il sera présent soutenant que la gestion de la pandémie « n’est pas un spectacle pour attirer l’attention ».

La cheffe libérale a néanmoins trouvé un appui chez un conseiller de la Ville de Montréal, Serge Sasseville, qui a écrit sur Twitter que ces rencontres avec le gouvernement « ressemblent » à celles que les élus municipaux ont les lundis avec la ministre responsable de la Métropole, Chantal Rouleau. « On tente de nous couper la parole dès que nos interventions contestent les mesures du gouvernement », dénonce-t-il.

Pas d’accès à l’information

Dominique Anglade soutient avoir demandé que ces réunions soient ouvertes aux médias et se tiennent en présence d’un représentant de la Santé publique pour répondre aux questions, ce qui aurait été refusé par le gouvernement. Lors de la première réunion, elle indique avoir voulu voir les avis de la Santé publique expliquant l’imposition du couvre-feu et les récentes fermetures.

« [Le gouvernement a] attendu [jeudi], la veille de l’autre rencontre, pour nous envoyer des informations, et c’est un résumé des mesures en vigueur. Les avis sur les fermetures des restaurants, du sport… le couvre-feu, il n’y a rien. Ce sont des résumés de mesures en vigueur qu’on peut trouver sur l’internet », déplore-t-elle dans une entrevue.

Le ministère de la Santé et des Services sociaux a publié jeudi les récents avis de la Santé publique, notamment sur les recommandations de l’administration de la troisième dose, la gestion des cas et des contacts dans les écoles et les rassemblements des Fêtes. Concernant le resserrement des mesures sanitaires annoncées le 31 décembre, on peut retrouver un tableau de mise en œuvre, sans explications.

« On n’a absolument rien de plus que ce qui a été mis en ligne », dénonce la cheffe libérale.

Je ne vois pas en quoi on [les chefs d’opposition] est mieux outillés pour répondre à des véritables questions que les gens se posent aujourd’hui.

Dominique Anglade, cheffe du Parti libéral du Québec

Le premier ministre a fait appel à la collaboration des partis de l’opposition la semaine dernière pour affronter la vague Omicron. « Je comprends qu’il y a une élection au mois d’octobre, mais on a besoin, pour les semaines qui viennent, de se serrer les coudes », avait-il expliqué au moment d’annoncer qu’il allait tenir une rencontre téléphonique hebdomadaire avec eux.

Ces rencontres virtuelles prennent fin à la rentrée parlementaire le 1er février.

La cheffe libérale avait réclamé au début du mois de janvier que M. Legault convoque d’urgence l’Assemblée nationale devant la menace posée par le variant Omicron, ce que le gouvernement avait refusé, signalant que la Santé publique demande aux Québécois de demeurer en télétravail. « Toute la semaine en commission parlementaire, il y a des gens qui siégeaient à l’Assemblée nationale, alors ça montre bien que c’était une excuse bidon de la part du gouvernement », critique-t-elle.

Dominique Anglade affirme qu’elle n’acceptera de reprendre les appels hebdomadaires avec le chef du gouvernement et les formations de l’opposition que si on rend ces appels publics.