(Québec) Plusieurs groupes, comme l’UPA, Équiterre ou Québec solidaire, demandent au gouvernement Legault de retirer de sa loi sur la réduction du fardeau administratif les dispositions favorisant le morcellement des terres agricoles. Ils réclament une nouvelle pièce législative et un débat portant uniquement sur cette question.

« Le morcellement des terres va bien au-delà̀ des allègements étudiés par la Commission de l’économie et du travail. Modifier de façon substantielle la loi sur la protection du territoire agricole et les compétences de la commission de la protection du territoire agricole nécessite une étude approfondie […] Ce n’est pas le cas actuellement par le biais d’un projet de loi qui n’a rien à voir avec l’agriculture, la relève agricole ou l’autonomie alimentaire du Québec », ont indiqué mardi l’Union des producteurs agricoles (UPA), la Fédération de la relève agricole du Québec (FRAQ), le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE), Équiterre et Vivre en Ville dans un communiqué de presse.

En parallèle, Québec solidaire (QS) a fait la même demande. « [Le ministre de l’Agriculture] André Lamontagne veut opérer une petite révolution en agriculture. C’est majeur et ça a le potentiel de révolutionner l’agriculture, mais ça a aussi le potentiel de nuire énormément. […] Il ne peut pas passer par la porte d’en arrière pour faire ces modifications », déplore la porte-parole en matière d’agriculture de QS, Émilise Lessard-Therrien.

La Presse rapportait lundi que le gouvernement Legault veut « favoriser le morcellement » des terres agricoles pour soutenir le développement des petites fermes avec l’appui des cultivateurs bios avec des dispositions inscrites dans un projet de loi porté par le ministère de l’Économie.

Étalement urbain caché

Il s’est toutefois buté à l’UPA qui craint un étalement urbain caché avec la multiplication de « maisons-manoirs » appartenant à des gens de la ville à la recherche de résidences secondaires. La crainte d’un étalement urbain caché et d’une perte de vocation du territoire agricole est partagée par d’autres groupes, comme Équiterre.

« Une terre agricole morcelée est beaucoup plus facile à dézoner. Le morcellement, c’est la tarte aux pommes, tout le monde est favorable, mais on ne s’entend pas sur l’ustensile. Dans le projet de loi actuel, il n’y a pas de garantie que la vocation agricole sera maintenue à long terme », explique Mme Lessard-Therrien.

Elle souhaite que le gouvernement Legault dépose un nouveau projet de loi qui ira plus en profondeur et qui s’attaquera également à d’autres problèmes, comme la financiarisation des terres agricoles.

Quant aux groupes, ils estiment qu’une pièce législative portée par le ministre Lamontagne permettrait d’étudier en profondeur « l’accès aux terres agricoles pour la relève et la diversification de l’agriculture, le financement des programmes dédiés à la relève, la financiarisation, la surenchère et l’accaparement des terres de moindre superficie, l’obligation de maintenir en culture les lots en zone agricole, la facilitation de l’accès aux terres par des conditions de location avantageuses et à long terme, et des incitatifs fiscaux pour favoriser la location ou la vente des terres à de jeunes agriculteurs », écrivent-ils.

De son côté, le gouvernement veut aider les villages qui se dévitalisent et permettre à la relève agricole d’obtenir des terres de la bonne dimension. Il a reçu l’appui de l’Union paysanne, notamment. Le système actuel, déplore le ministre, « rends la vie très difficile à des jeunes qui ont de bons projets » et 25 % des agriculteurs de la relève souhaitent se diriger vers un modèle alternatif qui repose sur une petite production, vendue à proximité dans un marché public ou en panier livrer directement au consommateur.

Le ministre André Lamontagne ne croit pas que cette ouverture au morcellement favorise l’étalement urbain. « Les craintes que je peux lire, honnêtement, c’est davantage dans l’interprétation un peu, ou l’imagination de l’interprétation qu’on peut faire en faisant peut-être des raccourcis », a-t-il dit lundi en entrevue avec La Presse.