(Ottawa) Des membres dirigeants du Parti vert du Canada souhaitent suspendre le financement de la campagne de la cheffe Annamie Paul qui espère remporter un siège au centre-ville de Toronto lors d’une élection probable plus tard cette année.

Quatre sources du parti, qui ont requis l’anonymat parce qu’elles n’étaient pas autorisées à parler publiquement de questions internes, ont déclaré qu’une motion avait été déposée lors d’une réunion du conseil fédéral le 29 juin pour retenir 250 000 $ précédemment réservés à la campagne de Mme Paul dans Toronto-Centre.

La Presse Canadienne a obtenu copie de la motion, selon laquelle le transfert de fonds prévu devrait être annulé « jusqu’à ce que le conseil fédéral ait été informé de la situation financière du Parti vert du Canada ». La motion doit faire l’objet d’un vote lors d’une réunion du conseil fédéral du parti le 27 juillet.

Le président du parti, Douglas Tingey, qui contrôle les opérations financières de la formation politique, n’a pas voulu commenter précisément les détails concernant cette motion, plaidant qu’il s’agit d’une affaire confidentielle.

Dans une réponse transmise par courriel lundi, M. Tingey affirme qu’« au meilleur de (sa) compréhension », le parti reste déterminé à soutenir Toronto-Centre à la prochaine élection.

Annamie Paul, qui n’a pas de siège à la Chambre des communes, est arrivée deuxième derrière la libérale Marci Ien lors d’une élection partielle pour remplacer l’ancien ministre des Finances Bill Morneau dans Toronto-Centre l’automne dernier. À l’élection générale de 2019, Mme Paul était arrivée au 4e rang dans cette même circonscription considérée comme étant un bastion libéral.

L’adoption de la motion signifierait que son équipe aurait moins d’argent à consacrer à la publicité, à la recherche et aux ressources humaines.

La décision d’arrêter le financement fait suite aux licenciements la semaine dernière d’environ la moitié des employés des verts, dont tout le personnel du cabinet de la cheffe. Le parti se débat également avec des querelles internes, dont une a fait surface en réaction au conflit israélo-palestinien. Cette dispute a entraîné la défection de la députée du Nouveau-Brunswick, Jenica Atwin, qui a rejoint les rangs du gouvernement libéral le mois dernier.

On ne compte plus que deux élus du Parti vert aux Communes, dont l’ex-cheffe Elizabeth May.

Le parti et les personnes occupant la présidence et la direction générale par intérim n’ont pas répondu à nos demandes de commentaires transmises lundi.

Annamie Paul, qui dirige le Parti vert depuis neuf mois, devra faire face à un vote de défiance du conseil fédéral le 20 juillet. Si la motion obtient l’appui des trois quarts des membres du conseil, la cheffe devra alors se soumettre à un vote de défiance de l’ensemble des membres du parti le mois suivant en assemblée générale.

À ce moment, la base militante aurait à se prononcer sur l’avenir du leadership de Mme Paul.

Un déséquilibre dans les finances du parti mine aussi la poursuite de ses activités, selon un rapport dévoilé la semaine dernière par le responsable du Fonds du Parti vert du Canada.

« Notre situation financière actuelle est insoutenable », a écrit Douglas Tingey.

Les dépenses des verts dépassent leurs revenus depuis l’élection, en février, d’un nouveau conseil d’administration du financement, révèle le rapport. À titre d’exemples, les coûts ont dépassé les revenus bruts de 105 000 $ en mai et de 103 000 $ en juin.

D’après le rapport de M. Tingey, ce déséquilibre s’explique par des décisions prises en 2019 et en 2020, plus particulièrement au sujet du maintien du personnel en place après l’élection de 2019.

Elizabeth May a abandonné son titre de cheffe en novembre 2019 et a nommé Jo-Ann Roberts comme successeure par intérim jusqu’à la nomination d’Annamie Paul en octobre 2020.

Cette crise financière sévit pourtant malgré une hausse du financement sous le leadership de Mme Paul. Le parti a réussi à recueillir environ 677 500 $ de 8300 donateurs au premier trimestre de 2021. Un bond appréciable par rapport aux quelque 577 600 $ obtenus de la part de 8200 donateurs l’année précédente, selon les chiffres rendus disponibles par Élections Canada.

Les mises à pied temporaires, annoncées la semaine dernière, visent à réduire les coûts des ressources humaines qui représentent 70 % des dépenses du Parti vert.

Le parti reconnaît que ces mises à pied vont avoir un impact significatif sur sa capacité à soutenir ses candidats et ses associations de circonscription à travers le pays. C’est pourquoi on souhaite rapatrier le personnel dès que la situation financière pourra être redressée.