(Québec) Les trois partis d’opposition n’ont pas l’intention de lâcher prise : ils vont continuer à faire obstacle au gouvernement Legault, déterminé selon eux à accaparer la cagnotte du Fonds vert, grâce au projet de loi 44.

Ils ne digèrent pas davantage l’abolition de l’organisme Transition énergétique Québec (TEQ), inscrite au projet de loi controversé.

Même si la session parlementaire est terminée, le gouvernement a choisi de prolonger l’étude détaillée du projet de loi 44, une de ses priorités des derniers mois, mais qu’il n’a pas réussi à rendre à terme avant l’ajournement du 12 juin.

Mardi, le Parti libéral du Québec (PLQ), Québec solidaire (QS) et le Parti québécois (PQ) ont tous trois réaffirmé qu’ils n’avaient pas l’intention de laisser le gouvernement aller de l’avant avec son projet de loi, à moins qu’il adopte une série d’amendements.

De fortes sommes sont en jeu : le Fonds vert est une cagnotte de près de 2 milliards.

L’opposition croit que le gouvernement cherche à s’accaparer le fonds « et faire ce qu’il veut avec cet argent-là », a dit la porte-parole solidaire, la députée de Mercier, Ruba Ghazal, en point de presse, mardi, avant le début des travaux.

Elle entend bien tenter d’empêcher le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, « de faire main basse sur le Fonds vert », et veut déposer des amendements en ce sens au projet de loi au cours des prochains jours.

Le nouveau porte-parole libéral en la matière, le député de Robert-Baldwin, Carlos Leitão, est d’avis lui aussi que le projet de loi, tel que rédigé, ouvre la porte à « l’arbitraire », en se donnant « le seul et dernier mot sur l’utilisation du Fonds vert ». Il s’inquiète de voir le gouvernement politiser ainsi l’attribution de fonds publics reliés à la protection de l’environnement.

En entrevue téléphonique, M. Leitão, qui a de nombreuses commissions parlementaires derrière la cravate, affirme même que le ministre Charette est le plus rigide et fermé qu’il ait rencontré de toute sa carrière politique. « Jamais vu un ministre comme ça », a-t-il dit.

Selon le porte-parole péquiste, le député de Jonquière, Sylvain Gaudreault, malgré un grand nombre d’heures d’étude, le projet de loi 44 présente toujours « des failles majeures », dont le pouvoir discrétionnaire démesuré octroyé au ministre.

Lui non plus n’accepte donc pas l’idée de voir le ministre « piger dans l’enveloppe » du Fonds vert « comme bon lui semble ».

Il réclame par ailleurs du ministre qu’il accepte de déposer chaque année un « budget carbone », qui ferait état des progrès accomplis dans la lutte aux changements climatiques et la réduction des gaz à effet de serre.

Le projet de loi 44, déposé en octobre, prévoit notamment l’abolition du Conseil de gestion du Fonds vert, un organisme indépendant créé en 2017, qui attribue les 1,8 milliard de fonds publics à des projets visant notamment à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES). C’est le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, qui déciderait donc lui-même d’allouer les fonds.

Ces fonds proviennent essentiellement de la vente de droits d’émissions dans le cadre de la Bourse du carbone, mais aussi des redevances exigibles pour l’élimination des matières résiduelles et celles pour l’utilisation de l’eau.

Le projet de loi abolit également l’organisme Transition énergétique Québec (TEQ), qui tirait une partie de son financement du Fonds vert.

Le TEQ a pour mandat de favoriser l’efficacité énergétique des entreprises, invitées à passer du mazout à l’électricité, par exemple.

La députée Ruba Ghazal considère que le TEQ est pourtant « un outil important et efficace qui nous permet d’atteindre nos cibles de gaz à effet de serre ».

Elle rappelle que « tous les groupes qui sont venus en commission nous l’ont dit : Transition énergétique Québec a l’agilité de mener des projets, de nous aider à mener des projets qui permettent de réduire les gaz à effet de serre ».

Le ministre Charette ne s’est pas adressé aux médias mardi.