(Ottawa) Les députés conservateurs refusent d’être précipités dans un vote sur une loi sur l’aide médicale à mourir, malgré une échéance imminente imposée par le tribunal.

Le gouvernement libéral minoritaire a jusqu’au 18 décembre pour adopter le projet de loi C-7, une loi visant à se conformer à une décision de la Cour supérieure du Québec qui a invalidé une disposition permettant uniquement aux personnes déjà proches de la mort de recevoir une aide médicale pour mettre fin à leurs souffrances.

Le gouvernement avait espéré conclure le débat sur le projet de loi à la Chambre des communes lundi, ouvrant la voie à un vote final mardi et laissant un peu plus de deux semaines au Sénat pour l’examiner avant l’arrivée de l’échéance.

Mais les députés conservateurs ont dénoncé l’urgence, certains d’entre eux qualifiant le délai d’« artificiel ».

Le gouvernement devrait revoir son ordre du jour pour reprendre le débat sur le projet de loi mercredi et pourrait encore essayer d’imposer une attribution de temps pour interrompre le débat, une initiative qui nécessiterait l’appui d’au moins un parti de l’opposition.

Une porte-parole du chef conservateur Erin O’Toole n’a pas été en mesure de dire combien de députés conservateurs veulent encore s’exprimer sur le projet de loi, mais étant donné qu’il s’agit littéralement d’une question de vie ou de mort, elle a déclaré que « quiconque souhaite s’exprimer sur le projet de loi est libre de le faire ».

Le projet de loi supprimerait la disposition selon laquelle seuls ceux dont la mort naturelle est raisonnablement prévisible ont le droit de demander une aide médicale à mourir. Mais il conserverait le concept de la mort prévisible pour mettre en place deux voies d’admissibilité différentes, l’une qui permettrait aux personnes proches de la mort de recevoir l’aide médicale à mourir, et une autre imposant des critères plus restrictifs à celles qui ne sont pas proches de la mort.

Les conservateurs ont été les seuls députés à faire des discours lors du débat sur le projet de loi lundi, et tous sauf un — le député de Toronto Peter Kent — s’y sont opposés. Tous, y compris M. Kent, ont critiqué le gouvernement pour avoir précipité le projet de loi à la Chambre des communes sans consultation adéquate.

Ils ont soutenu que le gouvernement aurait dû interjeter appel de la décision du tribunal du Québec devant la Cour suprême et estiment qu’il ne devrait pas apporter de modifications à la loi canadienne sur l’aide à mourir tant que le Parlement n’aura pas procédé à l’examen quinquennal de la loi.

Cet examen devait commencer en juin, mais a été retardé en raison de la pandémie de COVID-19. Les députés conservateurs ont noté que le gouvernement avait encore retardé les choses en prorogeant le Parlement en août pendant six semaines.

« Pourquoi se précipiter pour adopter cette législation imparfaite alors que c’est vraiment une question de vie ou de mort ? », a demandé le député conservateur de l’Ontario Michael Barrett.

« Nous faisons beaucoup de choses rapidement ici, mais nous pouvons certainement convenir que cette étape n’en est pas une qui doit être faite de manière aussi hâtive. »

À un certain moment, le député libéral Kevin Lamoureux, secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre, a demandé si les conservateurs avaient l’intention de « nous faire continuer à débattre de cette question indéfiniment ».

« Il est très clair que ce projet de loi a été adopté précipitamment pour essayer de se conformer à une date arbitraire qui a été fixée par ce juge d’un tribunal inférieur », a rétorqué le député conservateur de la Colombie-Britannique, Ed Fast.

« Cela mérite un examen approfondi par la plus haute cour du pays et, malheureusement, le gouvernement libéral actuel a refusé de le faire pour les Canadiens. »

Le député conservateur de l’Alberta, Damien Kurek, a déclaré qu’il trouvait « troublant qu’ils semblent avoir fabriqué un sentiment d’urgence ».

Le ministre de la Justice, David Lametti, a déclaré que la décision du tribunal annulant l’exigence de décès prévisible ne s’applique techniquement qu’au Québec. Ainsi, si le gouvernement ne respecte pas le délai, qui a déjà été prorogé à deux reprises, il a prévenu que les Québécois aux prises avec une souffrance intolérable, mais qui ne sont pas proches de la mort auront accès à l’aide médicale à mourir alors que ceux du reste du pays n’y auront pas droit.

Entre autres choses, les députés conservateurs se sont plaints du fait que le projet de loi C-7 va bien au-delà de la décision du tribunal, assouplissant certaines des règles permettant aux personnes proches de la mort de recevoir l’aide médicale à mourir. Et, en étendant l’aide à mourir à ceux qui ne sont pas proches de la mort, ils ont soutenu que le gouvernement dit aux Canadiens handicapés que leur vie ne vaut pas la peine d’être vécue.

Les conservateurs ont proposé un certain nombre d’amendements lorsque le projet de loi a été examiné par le Comité de la justice des Communes, mais ils ont tous été rejetés.

Ils en relancent deux pour examen par la Chambre des communes.

On rétablirait le délai de réflexion requis de 10 jours, que le projet de loi propose d’abandonner pour les personnes proches de la mort. L’autre porterait à 120 jours la période proposée de 90 jours pour évaluer les demandes d’aide médicale à mourir émanant de personnes qui ne sont pas proches de la mort.