(Québec) Le président français Emmanuel Macron a appelé mardi François Legault pour le remercier du « soutien du Québec dans la défense de la liberté d’expression », a annoncé le premier ministre du Québec.

Cet appel non banal en diplomatie survient alors que le premier ministre canadien Justin Trudeau a comparé il y a quelques jours la publication de caricatures de Mahomet, comme l’a fait le magazine Charlie Hebdo, à l’acte de crier « au feu » dans un cinéma bondé.

« La liberté d’expression n’est pas sans limites. On n’a pas le droit, par exemple, de crier au feu dans un cinéma bondé de monde », avait dit M. Trudeau après avoir assuré qu’il est un défenseur de la liberté d’expression.

« Dans une société pluraliste, diverse et respectueuse comme la nôtre, nous nous devons d’être conscients de l’impact de nos mots, de nos gestes, sur d’autres, particulièrement ces communautés, ces populations qui vivent énormément de discrimination encore », avait-il poursuivi.

Questionné sur l'appel entre M. Legault et M. Macron, mardi, Justin Trudeau a affirmé qu'il s'attendait à « parler avec le président français dans les moments à venir ». Le premier ministre fédéral a ajouté qu'il ne condamnait pas la publication des caricatures de Mahomet, alors que « c'est important qu'on continue d'avoir et qu'on défende la liberté d'expression. »

« Nous allons toujours défendre la liberté d'expression. Les journalistes, les artistes ont un rôle important dans notre société », a-t-il ajouté.

Le Québec face au « multiculturalisme »

Après avoir publicisé l’appel qu’il a reçu du président Macron, mardi, François Legault a affirmé qu’il refusait de « faire des compromis exagérés » qui mèneraient à limiter la liberté d’expression. Dans une déclaration écrite, plus tôt en journée, le premier ministre avait souligné que « ça vaut la peine de rappeler les faits », alors que la France est secouée par des attentats terroristes et qu'un professeur a été décapité par un terroriste islamiste pour avoir montré des caricatures de Mahomet dans un cours.

« C’est certain qu’il y a certains dirigeants politiques qui craignent le terrorisme et qui, devant le chantage de certains groupes religieux radicaux, sont prêts à faire des accommodements qui ne sont pas raisonnables », a dit le premier ministre en point de presse.

Pour M. Legault, le problème s’inscrit au Canada dans « toute la question du multiculturalisme ».

« La nation québécoise a des valeurs, on a le droit de défendre ses valeurs. Parmi ces valeurs, il y a la liberté d’expression, il y a la laïcité, il y a la langue française. Ce n’est pas vrai qu’au nom du multiculturalisme qu’on va mettre ça de côté et qu’on va faire des compromis qui sont exagérés », a-t-il dit.

« Dans une société démocratique comme la nôtre, on ne doit surtout pas plier devant l’intimidation et la violence de ceux qui sont en désaccord avec la liberté d’expression. Si on se met à faire des compromis là-dessus, on ébranle les fondements de notre société. La nation française est notre alliée et même un peu plus que ça. Elle peut compter sur nous », a également affirmé François Legault.

Cette défense du caractère inviolable de la liberté d’expression a également trouvé écho à l’Assemblée nationale, où tous les partis d’opposition ont appuyé la France dans son combat pour la liberté d'expression.

« La liberté d'expression, elle existe et elle est importante. Nous devons la défendre. Elle vient évidemment avec une responsabilité, qui est de celle de ne pas inciter à la haine et de ne pas inciter à la violence (…). Mais la liberté d'expression, de faire de la satire, de faire des caricatures, ça fait partie de cette liberté d'expression », a notamment affirmé la cheffe du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade.

- Avec La Presse Canadienne