(Ottawa) Tout comme deux de ses ministres la veille, Justin Trudeau a peiné à trouver des arguments pour justifier que les nouvelles prestations annoncées jeudi devront attendre l’adoption du discours du Trône le 23 septembre avant d’être mises en place.

Des changements aux règles de l’assurance-emploi vont permettre à quelque trois millions de Canadiens de passer de la Prestation canadienne d’urgence (PCU) au régime d’assurance-emploi presque sans heurt, fin septembre.

Cependant, entre un million et un million et demi de chômeurs créés par la pandémie de la COVID-19 ne se qualifieront pas à l’assurance-emploi. Pour eux, le gouvernement fédéral a imaginé une nouvelle Prestation canadienne pour la relance économique (PCRE). Mais celle-ci, comme les 10 jours de congé de maladie payés par Ottawa et la prestation pour s’occuper d’une personne à charge, dépendra de l’adoption du discours du Trône.

Plusieurs y voient une manœuvre politique pour forcer la main à l’opposition qui, si elle faisait tomber le gouvernement en septembre, porterait l’odieux de priver d’aide fédérale des millions de Canadiens aux prises avec la pandémie.

Interrogé à ce sujet pendant un passage à Brockville, en Ontario, le premier ministre Trudeau s’est contenté de répéter que la prorogation ne changeait rien aux paiements de PCU.

« Cet aspect de prorogation n’affectera en rien l’aide qu’on envoie actuellement et qu’on va continuer d’envoyer aux Canadiens », a-t-il dit.

La PCU prendra fin le 27 septembre.

Si le premier ministre avait attendu quelques semaines avant de proroger le Parlement, les élus auraient eu le temps d’adopter des lois pour mettre en place les trois nouvelles prestations.

C’est en répondant à une autre question sur l’accumulation de déficits que M. Trudeau a ouvert quelque peu son jeu.

« Nous allons mettre en place des mesures, pas pour revenir au statu quo, mais pour mieux reconstruire. Ce sera un plan ambitieux pour l’avenir du pays […] Il y aura sans doute d’importants débats (au Parlement) avec les partis qui croient qu’on ne devrait pas en faire autant », a-t-il déclaré, donnant raison à ceux qui disent que ces trois nouvelles prestations serviront aux libéraux de munitions politiques.

Jeudi soir, le chef du Bloc québécois, tout en applaudissant aux mesures annoncées, avait mis en garde contre leur utilisation à des fins partisanes. Yves-François Blanchet relayait à nouveau ce message sur son fil Twitter vendredi.

« Cette mesure législative aurait dû être votée avant la prorogation du Parlement. Je mets en garde le premier ministre contre la tentation de prendre en otage les travailleurs et les entreprises pour forcer l’adoption du discours du Trône », a-t-il écrit.