(Québec) Appelé à arbitrer la controverse vestimentaire de la députée Catherine Dorion, de Québec solidaire (QS), le président de l’Assemblée nationale, François Paradis, s’en lave les mains.

Il admet son impuissance sur la définition du code vestimentaire et affirme ne pas avoir aperçu l’élue de QS quand elle a siégé avec un chandail en coton ouaté il y a quelque temps.

Dans une rare mêlée de presse de la présidence mardi, M. Paradis a déclaré qu’il ne peut se référer qu’à ce qu’il voit depuis le trône et s’en remet aux partis quant à la définition des règles.

Depuis deux semaines, la présidence est éprouvée par les controverses de Catherine Dorion. La semaine dernière, des élus ont menacé d’en appeler au président en pleine séance pour rappeler à l’ordre la députée QS de Taschereau, qui portait un kangourou. Mme Dorion a alors préféré rebrousser chemin plutôt que de se pointer en Chambre.

Mardi après-midi, avant d’aller présider la période de questions, M. Paradis a rappelé que le décorum fait état de « tenue de ville » et de « tenue de circonstance » dans les lieux de débats, comme le Salon bleu et les salles de commission parlementaire.

« Le t-shirt, ou un chandail avec un slogan, ou une tenue de sport, ne fait pas partie des tenues de circonstance », incluant les chandails en coton ouaté, a-t-il laissé entendre.

« Maintenant, ce sera appliqué », a-t-il conclu.

Quant à savoir pourquoi Mme Dorion avait pourtant été vue précédemment en train de siéger avec le même chandail, il a soutenu ne pas l’avoir alors remarquée.

M. Paradis a par ailleurs énoncé qu’il ne peut pas changer unilatéralement les règles de l’Assemblée nationale. Il a précisé qu’il y a des échanges concernant la modernisation du décorum.

« Les discussions sont en cours et se font avec toutes les formations parlementaires », a-t-il indiqué, en précisant que la décision sera prise « par le biais de consensus » — on peut donc présumer que l’unanimité ne sera pas requise.

Rappelons qu’un mouvement de port de chandail en coton ouaté a été lancé en soutien à Mme Dorion. La Fédération des femmes du Québec (FFQ) est même allée plus loin en appelant au port du voile — un signe religieux musulman que la loi sur la laïcité du gouvernement Legault proscrit pour les employées de l’État en position d’autorité.

Autant le Parti libéral (PLQ), que le Parti québécois (PQ) et le leader parlementaire de QS, Gabriel Nadeau-Dubois, ont appelé le président à clarifier les règles vestimentaires.

Mme Dorion a aussi provoqué une tempête en publiant une photo humoristique d’elle dans le Salon rouge, l’enceinte réservée aux cérémonies officielles au parlement.

Remarquée depuis son élection pour ses t-shirts et ses bottes Doc Martens, la députée y apparaît plutôt dans une tenue classique, en tailleur et talons hauts, assise sur le pupitre central, entre les drapeaux du Canada et du Québec, avec l’inscription « Joyeuse Halloween ».

PHOTO PUBLIÉE SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX PAR CATHERINE DORION

La députée avait aussi lancé une invitation pour une soirée d’Halloween dans son bureau de circonscription, avec le logo de l’Assemblée nationale et le titre suivant : « F CK LA NORME. »

L’opposition officielle a demandé à la commissaire à l’éthique et à la déontologie, Ariane Mignolet, de se pencher sur le cas de Mme Dorion.

« Il apparaît évident que de pareils agissements vont à l’encontre du Code d’éthique et de déontologie en ce qui concerne les valeurs qui sont exprimées », pouvait-on lire dans la lettre de la whip du PLQ, Nicole Ménard.

Mme Ménard soutient aussi que ces incidents sont « une vive insulte auprès des députés et de ses collègues femmes au premier titre ».

Après l’affaire du chandail en coton ouaté, la vice-présidente de l’Assemblée, la députée caquiste Chantal Soucy, avait déclaré : « On a un décorum à respecter, il était temps de tracer une ligne. La tenue vestimentaire était frappante. Ce n’était pas une tenue vestimentaire digne d’une députée dans l’enceinte du Salon bleu. »