Une victoire au golf. Une soirée de gardiennage. Un concours d'orthographe. Un bonjour discret dans le couloir à l'école. À Rivière-du-Loup, tout le monde a une histoire à vous raconter sur Mario Dumont.

Dans son patelin, le chef démissionnaire de l'ADQ est à la fois une idole politique et un gars ordinaire, celui qui habite dans l'ancienne ferme de ses parents - «sur le rang 2», comme on dit là-bas. «C'est notre petit Mario», dit Pierrette Bélanger, qui voit parfois son député retontir dans sa jolie boutique pour acheter des fleurs à sa femme Marie-Claude Barrette.

En plus d'être une amie de longue date de la famille Dumont, Pierrette Bélanger a vu sa fille garder Angela et Charles, les deux premiers enfants du député, il y a déjà quelques années. Lundi soir, cette partisane de la première heure de Mario Dumont a assisté au dévoilement des résultats électoraux au quartier général de l'ADQ à l'hôtel Universel. «C'était vraiment triste, au point où je n'ai pas dormi de la nuit, dit-elle. Ma fille et moi adorons les Dumont, qui sont des gens tellement simples. C'est du trop bon monde.»

Au restaurant L'Estaminet, l'établissement le plus fréquenté de la rue principale, la fin du règne de Mario Dumont à l'ADQ occupait la plupart des conversations. Plusieurs clients se remémoraient leurs souvenirs du politicien qui était le chouchou des Québécois il n'y a pas encore si longtemps. «Mario nous saluait toujours quand on le croisait dans les corridors et il continue de se rappeler de nous aujourd'hui, dit Micheline Levasseur, qui travaillait comme secrétaire au collège Notre-Dame, l'école secondaire privée fréquentée par Mario Dumont. La politique ne lui a pas monté à la tête. Il est resté humble. Il n'a pas honte de dire qu'il vient du Bas-du-Fleuve.»

De premier ministre en attente à simple citoyen

Il y a 20 mois, les résidants de Rivière-du-Loup croyaient bien compter parmi les leurs le futur premier ministre du Québec. Avec 41 députés et le momentum qui jouait en sa faveur, Mario Dumont avait tout d'un premier ministre en attente.

Mais le verdict de lundi soir est venu tout changer - pour le principal intéressé comme pour ses partisans à Rivière-du-Loup. «Une partie des gens qui votaient pour Mario espérait qu'il devienne premier ministre, mais tout ça vient de s'éteindre», dit le maire de Rivière-du-Loup, Michel Morin.

Même les électeurs qui n'ont jamais voté pour lui tracent un bilan positif de ses années comme député. «Il a obtenu beaucoup pour Rivière-du-Loup, notamment sur la question des régions-ressources. Ça a créé de l'emploi ici», dit Yves Dubé, un «irréductible péquiste» qui a rencontré le jeune Dumont pour la première fois lors d'un concours d'orthographe - une dictée - à Montréal, alors que le futur politicien avait 17 ans.

Un successeur libéral?

Lundi soir, Mario Dumont a été réélu dans sa circonscription pour un cinquième mandat qu'il ne finira visiblement pas. Tôt ou tard - plus tôt que tard, selon le maire Morin -, les citoyens seront conviés aux urnes dans une élection partielle. Une perspective qui n'enchante personne au restaurant L'Estaminet. «On va encore avoir des maudites élections!», dit Nicole Lavoie, une secrétaire juridique qui se targue d'avoir déjà battu son député dans un tournoi de golf.

Le maire Morin a déjà une bonne idée du successeur de Mario Dumont: son ancien adversaire libéral Jean D'Amour, qui a été battu par Dumont aux élections de 1994 et 2007. L'ancien maire de Rivière-du-Loup est aujourd'hui président du PLQ. «Jean, c'est son rêve d'être député», dit le maire Morin.

Et l'ADQ dans tout ça? «Les gens votaient plus pour Mario que pour son parti», laisse échapper le maire Morin.

Que réserve l'avenir au fils prodige de Cacouna? Certains parient sur un passage à Ottawa avec les conservateurs de Stephen Harper. D'autres sur un retour à la Bourassa, après s'être éclipsé de la scène politique québécoise pendant plusieurs années.

Mais pour les citoyens de Rivière-du-Loup, une certitude demeure: en deux décennies de vie politique, cet homme tantôt fédéraliste, tantôt souverainiste, tantôt autonomiste n'aura jamais renié sa première allégeance - celle à son coin de pays.