Éloquent orateur, Claude de Montigny, professeur émérite, chercheur en neuropsychiatrie et psychiatre retraité à l'Université McGill, est mort subitement le 19 octobre dernier à l'âge de 67 ans.

M. de Montigny a utilisé ses connaissances en neuroscience afin de développer des pistes de traitement contre la dépression majeure. «Au début des années 80, il a découvert que le lithium peut être combiné avec des antidépresseurs. C'est une découverte qui est encore grandement utilisée, surtout si ces médicaments donnent peu de résultats», explique la Dre Mimi Israël, chef du Département de psychiatrie de l'Université McGill.

Un parcours édifiant

Claude de Montigny a étudié d'abord la médecine à l'Université de Montréal. Au début des années 70, il entreprend au même endroit un doctorat en neuroscience avec un chercheur de grande réputation, Yves Lamarre.

Puis, en 1976, le scientifique convainc son épouse Monique de déménager aux États-Unis afin de faire un stage postdoctoral à l'Université Yale. M. de Montigny travaille étroitement avec George Aghajanian qui dirige à l'époque l'un des meilleurs laboratoires d'électrophysiologie du monde.

Ses travaux sont alors publiés dans Science, l'une des deux revues scientifiques les plus prestigieuses du monde. De l'avis de plusieurs personnes interrogées, ce fut le tremplin vers une longue carrière de calibre international.

À son retour à Montréal, en 1977, M. de Montigny est engagé à titre de chercheur et clinicien dans le département de psychiatrie et devient membre du centre de recherche en neuroscience de l'Université de Montréal.

L'homme construit peu à peu une équipe de jeunes chercheurs dynamiques dont Yves Chaput, Pierre Blier et Guy Debonnel, aujourd'hui décédé. Leurs travaux recueillent de nombreux prix.

Dix ans plus tard, en 1987, l'Université McGill le courtise afin qu'il vienne travailler de l'autre côté de la montagne. Il fonde l'Unité de neurobiologie psychiatrique. Il y restera jusqu'à sa retraite.

«M. de Montigny a inspiré de nombreux étudiants en médecine et de résidents en psychiatrie, dont moi-même, précise la Dre Israël. Tout le monde était en admiration devant ce professeur qui était reconnu mondialement.»

De son côté, le Dr Jean-Claude Béïque, un de ses nombreux anciens étudiants, vante ses nombreuses qualités. «Il avait un souci du détail inouï. Lorsqu'il nous rendait une copie de nos travaux manuscrits, c'était rouge partout. Il corrigeait jusqu'aux virgules de nos références. C'est lui qui nous a appris comment écrire un article scientifique.»

Sa participation à des congrès scientifiques en Europe et dans le monde était grandement sollicitée. Sa fille Violaine se souvient des nombreux voyages en Europe. La jeune vétérinaire garde aussi de beaux souvenirs de moments passés avec sa soeur Catherine au lac de l'Achigan, dans les Laurentides. «C'était le havre de paix de mon père. Il aimait s'y refugier», confie-t-elle.

Ce travailleur acharné a toujours été un père présent. «Les fins de semaine, il nous emmenait, ma soeur et moi, à son laboratoire. On s'amusait pendant qu'il travaillait.»

De nombreux prix

M. de Montigny a remporté de nombreux prix, dont le Selo de la NARSAD (National Alliance for Research in Schizophrenia and Affective Disorders). «En 1995, il fut le premier Canadien à recevoir cet honneur d'une fondation américaine prestigieuse, spécialisée dans la recherche sur les maladies mentales», explique la Dre Israël.

Sa contribution scientifique est inestimable. Environ 20% de la population souffre de dépression. Les découvertes de ce grand médecin québécois ont sans contredit sauvé de nombreuses vies. «Il a sans doute épargné une grande souffrance à de nombreuses familles», conclut la chef du Département de psychiatrie de l'Université McGill.

M. de Montigny laisse dans le deuil sa femme Monique avec qui il était marié depuis 45 ans, ses deux filles et trois petits-enfants. Ses funérailles ont eu lieu le 28 octobre dernier.