Le Canada espère s’approcher d’un traité international contraignant pour éliminer la pollution plastique d’ici 2040 lors de la quatrième séance de négociations des Nations unies qui s’ouvrira à Ottawa ce mardi. Il a envoyé un premier signal lundi, à l’occasion du Jour de la Terre, avec la création d’un registre fédéral sur les plastiques afin d’obliger les fabricants à rendre compte annuellement de leur production.

Ce qu’il faut savoir

Le Canada est l’hôte de la quatrième ronde de négociations des Nations unies pour éliminer la pollution plastique d’ici 2040.

Le ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, a envoyé un premier signal lundi en annonçant la création d’un registre fédéral sur les plastiques.

L’ONU estime que 37 millions de tonnes de pollution plastique pourraient se retrouver chaque année dans les océans d’ici 2040.

« Ce registre obligera les fabricants de plastiques à assumer une plus grande responsabilité pour les plastiques qu’ils mettent sur le marché », a expliqué le ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, lors du coup d’envoi de l’évènement.

« Chaque année, à partir de maintenant, ils devront déclarer la quantité et les types de plastiques qu’ils mettent en marché au pays », a-t-il ajouté devant un parterre de délégués.

Les fabricants devront également spécifier la façon dont ces plastiques circulent dans l’économie et la façon dont ils les gèrent à la fin de leur vie utile. Cela inclut la quantité qui est réutilisée ou recyclée et celle qui est tout simplement jetée à la poubelle. Ces informations permettront au gouvernement de mesurer les progrès accomplis et les lacunes à corriger dans le cadre du Plan d’action pancanadien visant l’atteinte de zéro déchet de plastique.

PHOTO SEAN KILPATRICK, LA PRESSE CANADIENNE

Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement

Notre message est simple : le Canada est déterminé à accélérer ses efforts domestiques et internationaux pour répondre à la crise actuelle de la pollution plastique.

Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement

Il mise avant tout sur l’économie circulaire qui consiste à produire des biens avec moins de ressources, puis à les réutiliser, les réparer et les recycler pour réduire la production de déchets. Au Canada, seulement 9 % des 4 millions de tonnes de déchets de plastique ont été recyclés en 2019, selon le ministère fédéral de l’Environnement.

Dix éléments clés

Le registre visera d’abord les emballages en plastique, les gadgets électroniques et les articles à usage unique et inclura par la suite les résines de plastique, les pneus et les produits en plastique pour l’agriculture.

« La vérité est que la production et les déchets plastiques tripleront d’ici 2060 si rien n’est fait », a signalé le ministre Guilbeault quelques heures plus tard en conférence de presse.

Nous estimons aujourd’hui que 37 millions de tonnes de pollution plastique pourraient pénétrer dans nos océans chaque année d’ici 2040. Nous n’avons plus de temps à perdre.

Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement

Cinq mois après leur dernière rencontre au Kenya, les négociateurs de 175 pays se retrouvent à Ottawa pour avancer sur un traité mondial contraignant pour mettre fin aux déchets plastiques dans le cadre du quatrième comité intergouvernemental de négociation (CIN-4) des Nations unies. Cette nouvelle ronde de négociations se déroulera jusqu’au lundi 29 avril.

La directrice du programme pour l’environnement de l’ONU, Inger Andersen, a identifié 10 éléments sur lesquels les pays doivent s’entendre pour conclure un accord ambitieux :

  • se donner des objectifs clairs et mesurables, limités dans le temps
  • éliminer les plastiques à usage unique
  • repenser les produits de plastique, incluant les emballages
  • mettre sur pied un régime de responsabilité élargie des producteurs pour les rendre responsables de la gestion de la fin de vie de leurs produits
  • renforcer le recyclage
  • trouver des solutions de rechange aux produits chimiques toxiques dans les plastiques
  • mettre l’accent sur la transparence et la reddition de compte
  • trouver des sources de financement publiques et privées
  • assurer une transition juste pour les ramasseurs de déchets dans les pays du Sud
  • s’attaquer à la pollution plastique dans les océans et sur les côtes

« Ce sont ces éléments sur lesquels je veux voir du progrès au cours des prochains jours, a-t-elle martelé. C’est ce sur quoi nous devons nous concentrer pour pouvoir livrer ce que nous avons promis. »

Responsabilité partagée

L’objectif est d’arriver à réduire le projet de texte du traité long de 77 pages en identifiant les points de convergence entre les parties tout en évitant de l’affaiblir.

Le ministre Steven Guilbeault a exprimé le souhait que les délégués s’entendent sur 70 % du traité pour ensuite en arriver à la conclusion d’un accord lors de la cinquième et dernière ronde de négociations, prévue en Corée du Sud en novembre.

Greenpeace Canada a salué la création du registre fédéral sur les plastiques et a émis le souhait que la CIN-4 mène à « un objectif juridiquement contraignant de réduction de la production de plastique » d’au moins 75 % d’ici 2040. L’Association canadienne de l’industrie chimique n’avait pas réagi au moment où ces lignes étaient écrites.

Le ministre québécois de l’Environnement, Benoit Charette, était sur place pour participer au lancement d’une coalition infranationale aux côtés de la Catalogne. « On le sait, les États fédérés ont leurs responsabilités, mais lorsqu’il est question de la gestion des matières résiduelles, ce sont souvent les villes, les provinces et les États qui ont ce défi-là au quotidien, a-t-il rappelé. Donc, c’est important qu’ils puissent avoir leur voix au chapitre. »

Il a également eu une rencontre avec son homologue fédéral, qui attend toujours sa stratégie pour protéger le caribou et ne s’est pas prononcé sur le nouveau registre sur les plastiques.

Avec La Presse Canadienne et l’Agence France-Presse