(Ottawa) Le Bloc québécois juge nécessaire la mise en place d’une entente administrative entre Ottawa et Québec afin de s’assurer que leur compromis sur la protection du français soit respecté, particulièrement par les banques.

« Ayons les banques à l’œil », écrit le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, dans une lettre ouverte publiée mardi où il plaide pour la mise en place d’une « veille soutenue » du comportement des « entreprises réfractaires » afin qu’elles reconnaissent « le droit inaliénable de travailler en français au Québec ».

M. Blanchet explique qu’il « doute de l’efficacité réelle » de ce qu’ont convenu les deux ordres de gouvernement, d’autant plus que cela « valide une étrange pratique » en donnant le choix aux entreprises entre deux lois, ici la Loi sur les langues officielles et la Charte de la langue française du Québec, et de leur permettre de « prendre celle qu’elles préféreront ».

Vendredi, le gouvernement Trudeau a annoncé à la fin de l’étude article par article du projet de loi C-13 qui modernise la Loi sur les langues officielles qu’il dépose une série d’amendements qui reflètent son arrangement avec le gouvernement du Québec. Ils ont tous été adoptés à l’unanimité.

Ainsi, les entreprises privées de compétence fédérale en sol québécois ne seront finalement pas forcées de s’assujettir à la Charte de la langue française du Québec, mais ça serait être tout comme, ou presque, si C-13 est adopté, a-t-on expliqué.

Quant aux banques, « toutes » celles qui devaient s’inscrire auprès de l’Office québécois de la langue française (OQLF) l’ont fait, a indiqué une porte-parole de l’institution. Il s’agit de la CIBC, la HSBC, la Laurentienne, la BMO, la Nationale, la Royale, la Scotia et la TD.

Au cours des dernières semaines, Air Canada et la Compagnie des Chemins de fer nationaux (CN) ont annoncé qu’elles s’inscrivaient volontairement auprès de l’OQLF, ce dont elles avaient l’obligation depuis quelques mois à la suite de l’adoption du projet de loi 96 par l’Assemblée nationale. Leurs décisions auraient grandement facilité les tractations avec Ottawa, selon des responsables du gouvernement du Québec.

Le compromis entre Ottawa et Québec avait convaincu vendredi le Nouveau Parti démocratique (NPD) de renoncer à appuyer un amendement-dont les libéraux étaient catégoriquement réfractaires-visant à assujettir ces entreprises à la Charte de la langue française du Québec, ce qui a ainsi brisé la majorité formée avec les députés du Parti conservateur et du Bloc.

Bien qu’il constate que le Québec ait été incapable « d’arracher davantage à Ottawa », M. Blanchet se réjouit que l’entente puisse protéger la langue française. « Ce n’est pas un recul », insiste-t-il en créditant à sa formation politique « une évidence : sans nos efforts soutenus depuis des années, ce progrès n’aurait même pas été considéré par Ottawa ».

Le Bloc « envisagera de voter en faveur » du projet de loi puisque sa version modifiée « semble correspondre à la volonté du Québec ». Il continuera toutefois à « militer activement » pour que le régime linguistique fédéral ne se consacre qu’à protéger le français dans le reste du pays « où sa survie est en grave péril », précise M. Blanchet.

Maintenant que l’étude en comité est terminée, le projet de loi C-13 est renvoyé à la Chambre des communes pour l’étape du rapport qui précède la troisième lecture. Il sera ensuite envoyé au Sénat. Le gouvernement espère une adoption rapide.