(Ottawa) La Commission sur l’état d’urgence, présidée par le juge Paul Rouleau, dévoilera son rapport vendredi sur le recours à la Loi sur les mesures d’urgence pour mettre fin au « convoi de la liberté » à Ottawa et aux blocages ailleurs au pays. En tout, 76 personnes avaient témoigné lors de cette enquête publique dont les audiences se sont étalées pendant plus d’un mois l’automne dernier.

Le juge Rouleau doit déterminer si la déclaration d’urgence du gouvernement était justifiée. Le recours à la Loi sur les mesures d’urgence en février 2022 avait eu l’effet d’un électrochoc. Il avait mené à la plus vaste opération policière de l’histoire du pays à laquelle plus de 2000 policiers avaient participé pour déloger les manifestants qui paralysaient le centre-ville d’Ottawa depuis trois semaines.

Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a répété jeudi que cette décision était nécessaire. « On avait invoqué la Loi sur les mesures d’urgence parce que la situation sur le terrain était sans précédent », a-t-il affirmé. Il s’est dit prêt à tirer des leçons du rapport de la Commission.

Le premier ministre Justin Trudeau et sept de ses ministres avaient défendu la décision du gouvernement durant les audiences. Le recours à la Loi sur les mesures d’urgence, critiqué par l’Association des libertés civiles, avait permis aux institutions financières de geler les comptes bancaires des manifestants et s’octroyer des pouvoirs extraordinaires comme celui de permettre aux autorités de réquisitionner des remorqueuses.

La Commission avait également entendu les témoignages de plusieurs organisateurs et participants à la manifestation contre l’obligation vaccinale pour les camionneurs, que les autorités avaient rapidement qualifiée d’occupation. Les principaux corps policiers – le Service de police d’Ottawa et son ancien chef Peter Sloly, la Police provinciale de l’Ontario et la Gendarmerie royale du Canada –, et la Ville d’Ottawa s’étaient également expliqués.

Après son arrivée à Ottawa le 28 janvier 2022, le convoi de la liberté avait inspiré d’autres convois de camions qui avaient bloqué le pont Ambassador à Windsor, en Ontario, et les postes frontaliers de Coutts, en Alberta, Emerson, au Manitoba, et une partie du Pacific Highway en Colombie-Britannique. Transports Canada avait évalué à 3,9 milliards la valeur totale des marchandises bloquées.

La Commission devait au départ remettre son rapport au Cabinet le 6 février, mais elle avait obtenu une extension jusqu’au 20 février. Cette enquête publique qui a été menée au pas de course est l’un des garde-fous inclus dans la loi afin que le gouvernement rende des comptes chaque fois qu’il déclare l’état d’urgence. Elle a coûté 18,8 millions.

La Loi sur les mesures d’urgence, adoptée en 1988 sous le gouvernement progressiste-conservateur de Brian Mulroney, a remplacé la controversée Loi sur les mesures de guerre, utilisée pour mettre fin à la crise d’Octore en 1970 après l’enlèvement du ministre québécois Pierre Laporte par le Front de libération du Québec.