(Ottawa) La fille d’un militant chinois pour les droits de la personne, dont on est sans nouvelles depuis trois mois, demande aux gouvernements vietnamien et chinois de révéler où il se trouve — et de lui permettre de venir au Canada.

Les proches de Dong Guangping n’ont pas eu de ses nouvelles depuis qu’il a été arrêté le 24 août par la police vietnamienne. Sa fille Katherine Dong, qui vit à Toronto avec sa mère, craint qu’il ait été depuis remis aux autorités chinoises.

« Je veux garder espoir, mais je crains le pire », a-t-elle dit lors d’une conférence de presse à Ottawa jeudi matin, aux côtés de représentants de l’Association torontoise pour la démocratie en Chine et de la Fédération pour une Chine démocratique.

L’Association torontoise pour la démocratie en Chine affirme que Dong Guangping avait été accepté par les autorités canadiennes en tant que « réfugié parrainé par le gouvernement », mais qu’Ottawa n’aurait pas été en mesure ensuite de persuader les autorités vietnamiennes de lui permettre de quitter le Vietnam et de venir s’installer au Canada.

L’association affirme que M. Dong s’est caché au Vietnam pendant 31 mois, alors qu’il tentait de retrouver sa liberté.

Policier congédié pour ses opinions

Les proches de M. Dong soutiennent qu’il a été congédié de la police en Chine, en 1999, parce qu’il avait signé une lettre publique liée à l’anniversaire des manifestations de 1989 sur la place Tiananmen. Il a ensuite été emprisonné pendant trois ans pour « incitation à la subversion du pouvoir de l’État ».

En 2015, M. Dong a fui en Thaïlande avec sa femme et sa fille, qui, elles, ont été réinstallées au Canada en tant que réfugiées. Par contre, la Thaïlande a renvoyé M. Dong en Chine. Après une nouvelle détention, il a de nouveau tenté de quitter la Chine, pour finalement arriver au Vietnam en janvier 2020.

Katherine Dong et ses alliés prévoyaient de remettre jeudi des lettres personnelles aux ambassades chinoise et vietnamienne à Ottawa. Mme Dong demande aux deux gouvernements de permettre aux responsables canadiens de rendre visite à son père immédiatement et de le laisser venir au Canada sans plus tarder.

Le gouvernement canadien m’a dit qu’il n’avait plus de nouvelles des responsables vietnamiens au sujet de mon père, a-t-elle déclaré jeudi, en essayant de retenir ses larmes. Pourquoi refuseraient-ils de nous dire s’il va bien ? Pourquoi refuseraient-ils de le laisser voyager au Canada et retrouver sa famille ? Est-ce parce que le Vietnam a livré mon père à la Chine ?

Katherine Dong

Alex Neve, ex-secrétaire général d’Amnistie internationale au Canada, et aujourd’hui chercheur à l’Université d’Ottawa, estimait jeudi que la décision du Vietnam de ne fournir aucune information au Canada concernant le statut de M. Dong constituait « toute une gifle diplomatique ».

L’ambassade du Vietnam au Canada n’a pas immédiatement répondu à une demande de commentaire.

Le Canada préoccupé

Le porte-parole d’Affaires mondiales Canada, Grantly Franklin, a indiqué que le gouvernement canadien était profondément préoccupé par la sécurité et le bien-être de M. Dong, et qu’il avait « fait part de ses préoccupations aux plus hauts échelons ».

« Les responsables [canadiens] s’efforcent de savoir où il se trouve, notamment par le biais d’un engagement diplomatique avec le Vietnam et la Chine, a indiqué M. Franklin. Le Canada est prêt à l’aider à retrouver sa famille.

« Le Canada exhorte le gouvernement du Vietnam à respecter son statut de réfugié et ses responsabilités internationales en matière de droits de la personne. »

Alex Neve, qui assistait aussi à la conférence de presse à Ottawa, a estimé qu’il y avait eu une « forte réponse » du gouvernement canadien, y compris des ouvertures du premier ministre Justin Trudeau et de la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, alors qu’ils assistaient à des réunions internationales ce mois-ci en Asie.

« Je pense que c’est encourageant pour nous tous. C’est certainement encourageant pour la famille, a déclaré M. Neve. Et je pense qu’il est vital que ça continue. »