Le Canada va continuer de se battre pour obtenir la libération de Michael Spavor et des autres Canadiens détenus de manière arbitraire en Chine, a promis le ministre des Affaires étrangères Marc Garneau après qu’un tribunal chinois eut condamné M. Spavor à 11 ans de prison pour espionnage.

S’exprimant lors d’une conférence de presse, mercredi, M. Garneau a dit que le gouvernement condamne « avec la plus grande fermeté » le verdict en Chine contre l’homme d’affaires canadien, qui fait suite à un procès à portes closes en mars dernier.

« Cette décision a été prise à la suite d’un processus manquant d’équité et de transparence, en plus d’un procès qui ne répondait pas aux normes minimales exigées par le droit international », a déploré le ministre.

Il a ajouté que le Canada travaille de concert avec ses alliés, dont les États-Unis, pour obtenir la libération de M. Spavor et de Michael Kovrig. Il n’a cependant pas voulu s’avancer sur le détail des négociations.

MM. Spavor et Kovrig sont détenus en Chine depuis l’arrestation de la vice-présidente de Huawei, Meng Wanzhou, en décembre 2018 à l’aéroport de Vancouver à la demande du gouvernement américain.

Le verdict de mercredi est la dernière indication de la façon dont Pékin intensifie la pression sur le Canada avant que la justice rende une décision concernant Meng Wanzhou, qui pourrait être extradée aux États-Unis pour faire face à des accusations criminelles.

La Cour suprême de la Colombie-Britannique s’apprêtait mercredi à entendre les arguments des avocats du gouvernement canadien en ce sens.

Questionné à savoir si le Canada négociait la libération de Mme Meng en échange des deux Michael, l’ambassadeur du Canada en Chine, Dominic Barton, a déclaré : « Il y a des efforts et discussions intenses. Je ne veux pas entrer dans les détails. Mais ça se poursuit. »

Le ministre Garneau est resté tout aussi prudent à ce sujet, se contentant de dire que « les discussions se poursuivent, je dirais à un niveau intense » avec les diplomates canadiens en Chine et aux États-Unis.

Il a poursuivi en soulignant que le Canada pouvait compter sur l’appui des États-Unis et que le président Joe Biden avait dit qu’il traitait ces deux citoyens canadiens au même niveau que des citoyens américains.

« Alors ça peut vous dire à quel point c’est quelque chose qui est prioritaire et important, non seulement pour le Canada, mais pour nos voisins américains », a fait valoir M. Garneau, qui n’a pas voulu s’avancer sur les détails entourant la nature des discussions avec les partenaires américains.

Suivant le verdict de M. Spavor, le premier ministre Trudeau a diffusé un communiqué pour dire que la condamnation et la peine imposées par la Chine sont absolument inacceptables et injustes.

« Le verdict rendu aujourd’hui pour M. Spavor arrive après plus de deux ans et demi de détention arbitraire, un manque de transparence dans le processus judiciaire et un procès qui n’a pas même satisfait aux normes minimales requises par le droit international », a-t-il déploré.

« Pour M. Spavor, ainsi que pour Michael Kovrig, qui est également détenu arbitrairement, notre priorité absolue reste d’obtenir leur libération immédiate. Nous continuerons de travailler sans relâche pour qu’ils rentrent à la maison le plus tôt possible », a ajouté M. Trudeau.

La condamnation de M. Spavor a également suscité de vives réactions de la part des États-Unis ainsi que de 24 autres gouvernements.

Des diplomates des États-Unis, du Japon, du Royaume-Uni, d’Australie, d’Allemagne et d’autres pays européens, en plus de l’Union européenne, étaient présents à l’ambassade canadienne à Pékin afin de démontrer leur soutien. Ils ont aussi publié des déclarations appelant à la libération des deux Michael.

Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a appelé la Chine à libérer, « immédiatement et sans conditions », MM. Spavor et Kovrig.

« Cette pratique de détenir de façon arbitraire les individus pour faire pression sur des gouvernements étrangers est complètement inacceptable. […] Les gens ne devraient jamais être utilisés comme monnaie d’échange », a-t-il plaidé dans un communiqué.

Le président du Conseil européen, Charles Michel, a écrit sur Twitter que « les détentions arbitraires n’ont pas leur place dans les relations internationales. L’UE est totalement solidaire avec le Canada dans sa condamnation de la sentence de M. Spavor. »

M. Spavor a été jugé par un tribunal dans la ville de Dandong, à environ 340 kilomètres à l’est de Pékin, à la frontière nord-coréenne. Le gouvernement de la Chine accuse M. Spavor d’avoir fourni des informations sensibles à M. Kovrig, un ancien diplomate, à compter de 2017.

Les deux Canadiens sont détenus depuis décembre 2018 et ont eu peu de contacts consulaires.

Mardi, un autre tribunal chinois a rejeté l’appel d’un troisième Canadien dont la peine de prison dans une affaire de drogue a été brusquement augmentée à une peine de mort.

« Nous continuerons de fournir de l’aide consulaire à ces trois Canadiens et de faire tout ce que nous pouvons pour les soutenir durant cette dure épreuve. Le Canada demeure résolu à mettre fin à la pratique de détention arbitraire dans les relations d’État à État », a réitéré le ministre Garneau, mercredi.

Aucune information n’a été donnée sur la date du procès de l’ancien diplomate canadien Michael Kovrig, qui est également accusé d’espionnage.

Meng Whanzhou, directrice financière de Huawei Technologies et fille du fondateur de l’entreprise, a été arrêtée le 1er décembre 2018 à Vancouver pour des accusations de fraude bancaire. La directrice financière et sa société Huawei nient ces accusations.

Elle est accusée aux États-Unis d’avoir menti concernant le contrôle de Huawei sur une autre entreprise qui faisait des affaires en Iran. Ce mensonge présumé aurait fait courir à la banque internationale HSBC le risque de violer les sanctions américaines contre Téhéran, soutiennent les procureurs américains pour avoir menti à la branche hongkongaise de la banque britannique HSBC au sujet d’éventuelles transactions avec l’Iran en violation de sanctions commerciales.

Le gouvernement chinois a dénoncé l’arrestation dans le cadre des efforts américains visant à entraver son développement technologique et a exigé la libération immédiate de Meng Whanzou.

Avec l'Associated Press