(Ottawa) Le chef conservateur Erin O’Toole dit qu’il a agi de manière appropriée après avoir entendu une « rumeur » au sujet de Jonathan Vance des mois avant que le général ne prenne le poste de chef d’état-major de la défense en juillet 2015.

Les commentaires font suite à de nouvelles questions sur la décision du gouvernement conservateur de Stephen Harper d’aller de l’avant avec la nomination de M. Vance en dépit de deux allégations distinctes selon lesquelles l’officier supérieur s’était engagé dans des relations inappropriées.

L’une de ces allégations tournait autour d’une relation que M. Vance avait avec une officière militaire américaine, Kerry Wheelehan, à propos de laquelle la police militaire a enquêté, mais n’a pas porté d’accusations, et les deux sont maintenant mariés.

L’autre allégation, selon laquelle le général avait une relation inappropriée avec une subordonnée de la base de Gagetown en 2001, aurait été abordée par M. O’Toole avant la nomination de M. Vance. C’est ce qu’a affirmé le mois dernier à un comité parlementaire l’ancien chef de cabinet de M. Harper, Ray Novak.

M. Vance, qui a démissionné de ses fonctions de chef d’état-major en janvier et est maintenant à la retraite de l’armée, n’a pas répondu aux demandes de La Presse Canadienne pour commenter les allégations, mais Global News a rapporté qu’il nie tout acte répréhensible.

M. O’Toole était le ministre des Anciens Combattants du Canada au moment où il a signalé la relation présumée et il a défendu la façon dont il a traité les allégations jeudi.

« Il n’y a pas eu d’allégations. J’ai entendu une rumeur sur laquelle je voulais qu’on enquête… Je voulais qu’une relation inappropriée sur laquelle j’avais entendu une rumeur soit investiguée », a-t-il affirmé.

M. Novak a témoigné qu’il avait par la suite demandé au conseiller à la sécurité nationale de l’époque, Richard Fadden, d’enquêter sur la question, et que les conservateurs étaient prêts à annuler sa nomination si les enquêtes de la police militaire et de M. Fadden révélaient des actes répréhensibles.

Mais le ministère de la Défense nationale a confirmé jeudi que la police militaire n’avait recommandé de clore son enquête que le 17 juillet 2015 – le jour même où M. Vance a été officiellement assermenté en tant que chef d’état-major de la défense lors d’une cérémonie faste à Ottawa.

L’enquête a été officiellement clôturée quatre jours plus tard, a déclaré le porte-parole du ministère de la Défense Daniel Le Bouthillier.

Pour sa part, M. O’Toole a continué d’attaquer la manière avec laquelle le gouvernement libéral a traité une plainte distincte pour inconduite sexuelle présumée de M. Vance qui a été soulevée par l’ombudsman militaire de l’époque Gary Walbourne au ministre de la Défense, Harjit Sajjan, en mars 2018.

Global News a rapporté que la plainte concernait un courriel obscène que M. Vance aurait envoyé à une caporale en 2012, avant de devenir chef d’état-major de la défense.

Le traitement de la plainte par le gouvernement fait maintenant l’objet de deux enquêtes en comité.

« Ils n’ont rien fait pendant trois ans, ont laissé tomber cette femme et ont envoyé un signal indiquant qu’ils étaient prêts à dissimuler un examen de la situation », a déclaré M. O’Toole. « C’est complètement inacceptable. Et cela montre une culture de camouflage et de corruption au sein du gouvernement Trudeau. »

Les conservateurs veulent entendre Katie Telford

Les conservateurs devraient faire pression vendredi pour que la cheffe de cabinet de M. Trudeau, Katie Telford, témoigne au comité de la défense de la Chambre des communes de ce qu’elle savait de la plainte après qu’elle a été présentée par M. Walbourne.

Des questions ont émergé sur ce que Katie Telford et le bureau du premier ministre savaient de la situation après les récentes déclarations d’un ancien conseiller de M. Trudeau à un comité chargé de faire la lumière sur les inconduites sexuelles dans l’armée.

Elder Marques a déclaré la semaine dernière que Mme Telford ou un assistant l’avait contacté au début de mars 2018 pour parler avec un haut collaborateur du ministre de la Défense Harjit Sajjan au sujet d’un problème impliquant Jonathan Vance.

L’ombudsman militaire de l’époque, Gary Walbourne, venait d’évoquer la plainte contre M. Vance, pour comportement sexuel inapproprié, avec le ministre Sajjan, lors d’une réunion à huis clos le 1er mars 2018.

M. Trudeau a défendu Mme Telford et son bureau en disant qu’il savait qu’il y avait une plainte contre le général maintenant à la retraite, mais que son bureau n’en connaissait pas la nature.

Des députés conservateurs, dont le chef Erin O’Toole, affirment que des témoignages et des courriels antérieurs montrent que le bureau de M. Trudeau savait que l’allégation concernait une inconduite sexuelle.

La cheffe adjointe de l’opposition, Candice Bergen, a posé une question de privilège à la Chambre des communes, mercredi, affirmant que les preuves contredisaient les déclarations de M. Trudeau selon lesquelles il ne connaissait pas la nature de la plainte contre M. Vance et qu’il avait délibérément induit les parlementaires en erreur.

« Il est scandaleux de croire que tout le monde autour de Justin Trudeau était au courant de ces allégations, mais que le premier ministre ne le savait pas », lit-on dans une déclaration commune des députés conservateurs Leona Alleslev et Pierre Paul-Hus ainsi que du porte-parole en matière de défense James Bezan.

« Si Justin Trudeau refuse de permettre à sa cheffe de cabinet de témoigner ou si les libéraux bloquent sa comparution au comité, c’est simplement une preuve de plus que les libéraux se soucient plus de camoufler et de protéger le « boys club » de l’armée que de protéger les femmes qui servent notre pays en uniforme. »

M. Walbourne a témoigné qu’il avait dit à M. Sajjan que la plainte était liée à un « comportement sexuel inapproprié », mais M. Marques a été plus circonspect dans son témoignage la semaine dernière en ce qui a trait à ce que lui et Mme Telford savaient sur la nature de la plainte.

« Je crois qu’on m’a dit que le problème était une question de faute personnelle », a raconté M. Marques au comité de défense des Communes.

« Je dois dire, dans le contexte où j’ai entendu cela, que je pense que ma présomption était certainement que cela pouvait être de nature sexuelle, mais je ne pense pas avoir reçu cette information spécifiquement. »

M. Trudeau a déclaré mercredi à la Chambre des communes que son gouvernement en aurait plus à annoncer bientôt sur des « mesures plus fortes » pour soutenir ceux qui servent dans l’armée.

Le comité de la défense doit se réunir à nouveau vendredi.