(Ottawa) Les femmes issues des Premières nations seront enfin traitées de la même façon que les hommes en vertu de la Loi sur les Indiens, qui leur permettra de transmettre leur statut à leur descendance au même titre que leurs vis-à-vis masculins, a annoncé vendredi la ministre des Relations Couronne-Autochtones, Carolyn Bennett.

L’admissibilité des femmes autochtones au statut d’Indien dépendait autrefois de leur mari. Une femme qui épousait un homme sans statut perdait le sien, mais l’inverse n’était pas vrai pour les hommes autochtones.

Bien que ces modalités aient été abandonnées en 1985, les femmes autochtones éprouvaient toujours de la difficulté à transmettre leur statut à leurs descendants.

Mais avec l’entrée en vigueur des dispositions restantes du projet de loi S-3, les descendants de femmes qui ont été privées de leur statut ou radiées des listes de bande en raison d’un mariage pourront s’inscrire en tant qu’Indiens, même s’ils sont nés avant le 17 avril 1985.

Lors de la création du registre des Indiens en 1951, celui-ci avait simplement intégré les listes de bande, sur lesquelles ne figuraient pas les noms de femmes ayant perdu leur statut, a expliqué la ministre Bennett.

« Il y aura dorénavant une égalité entre les genres pour toutes les femmes, même avant que le registre ait été créé, et leurs descendants », a-t-elle fait valoir en entrevue avec La Presse canadienne.

Un communiqué de son ministère rapporte que, selon des estimations démographiques indépendantes, entre 270 000 et 450 000 personnes seront nouvellement admissibles au statut d’Indien au cours de la prochaine décennie grâce à l’élimination de la date limite de 1951.

L’Alliance féministe pour l’action internationale a salué vendredi les efforts de la ministre pour avoir « enfin retiré la discrimination sexiste de la Loi sur les Indiens ».

Il s’agit d’un « excellent premier pas » vers la mise en œuvre des recommandations de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, a écrit l’Alliance sur Twitter.

Un communiqué du Congrès des peuples autochtones fait également état d’un « énorme pas en avant ».

« Cependant, la reconnaissance du statut d’Indien doit aller au-delà d’une modification de la loi », ajoute le CPA, en réclamant une stratégie pour desservir les autochtones vivant hors réserve et en milieu urbain — « une population qui devrait connaître une croissance spectaculaire dans les années à venir », souligne-t-on.

L’inscription permet aux membres des Premières nations de bénéficier de prestations et de services du gouvernement fédéral, tels que des fonds en éducation postsecondaire et des services de santé non assurés.

Ottawa a adopté la Loi sur les Indiens en 1876, conférant au gouvernement fédéral un contrôle énorme sur les membres inscrits des Premières nations, leurs conseils de bande et les terres de réserve.

Des militants ont longtemps dénoncé la discrimination sexiste de la Loi sur les Indiens, a reconnu la ministre Bennett vendredi, en soulignant que leur persistance a porté ses fruits.

« Nous avons maintenant une obligation envers ces gens en vertu de leurs droits de l’article 35 et nous devons nous assurer qu’ils pourront exercer ces droits en temps voulu et que l’argent sera rendu disponible quand ils s’inscriront », a indiqué la ministre, sans fournir un montant précis.

Le projet de loi S-3 avait été présenté en réponse à une décision de la Cour supérieure du Québec, selon laquelle certaines sections de la Loi sur les Indiens relatives à l’inscription au registre enfreignaient la Charte canadienne des droits et libertés.

La cause avait été portée devant les tribunaux par Stéphane Descheneaux, de la communauté abénaquise d’Odanak, à 40 kilomètres au nord-ouest de Drummondville.

M. Descheneaux ne pouvait pas transmettre son statut à ses trois filles puisqu’il l’avait lui-même obtenu de sa grand-mère autochtone, qui l’avait perdu en épousant un homme allochtone.