La Cour fédérale a refusé jeudi à Lucy Francineth Granados un sursis au renvoi, et la résidente sans-papiers de Montréal risque d'être déportée au Guatemala dès vendredi matin, a indiqué Solidarité sans frontières.

La Cour fédérale a refusé en fin d'après-midi de suspendre la déportation de la mère célibataire de trois enfants qui vit à Montréal depuis neuf ans. Le sursis était réclamé dans l'attente d'une décision sur une demande de résidence permanente pour raison humanitaire.

Mary Foster, amie de Lucy Francineth Granados et militante de Solidarité Sans Frontières, a affirmé que les gens s'étant mobilisés pour la femme de 42 ans étaient «très tristes et très déçus», se demandant «où est le Canada féministe et des droits humains».

Mme Foster a dit avoir parlé à Lucy Francineth Granados, jeudi soir.

«Elle est une femme forte, mais c'est quelque chose de tellement difficile pour elle. Jusqu'à cet après-midi, elle a eu plein d'espoirs. Elle a pensé que la Cour fédérale allait accepter d'accorder un sursis», a-t-elle confié.

Selon Solidarité sans frontières, le seul recours contre la déportation résiderait en une «intervention directe» du ministre fédéral de l'Immigration, Ahmed Hussen, ou du ministre fédéral de la Sécurité publique, Ralph Goodale.

Cela semblait fort peu probable, selon les informations obtenues auprès des représentants des ministres fédéraux.

Scott Bardsley, attaché du ministre de la Sécurité publique Ralph Goodale, a simplement dit jeudi soir ne pas pouvoir «commenter sur les dossiers particuliers», et que le ministre accordait «un sursis à une mesure de renvoi que dans des situations exceptionnelles». Il a indiqué en entrevue téléphonique qu'un sursis servait généralement à donner plus de temps au ministre de l'Immigration pour évaluer un dossier pour des raisons humanitaires.

Au bureau du ministre de l'Immigration, l'attaché Mathieu Genest a indiqué que M. Hussen n'était pas disponible pour une entrevue. Il a aussi affirmé par courriel ne pas «pouvoir commenter les dossiers particuliers», et a soutenu que ces «questions étaient traitées très sérieusement et qu'une décision de déporter quelqu'un du Canada n'était pas prise à la légère».

Lucy Francineth Granados est en attente d'une réponse depuis six mois sur une résidence permanente pour raison humanitaire, selon son avocat, Stewart Istvanffy, et ses proches.

Elle plaide qu'elle a dû fuir le Guatemala après avoir été menacée par un gang criminel. Depuis son arrivée au Canada en 2009, elle agit comme soutien financier pour ses enfants et sa famille restés en Amérique centrale.

Me Stewart Istvanffy a expliqué que le juge à la Cour fédérale avait déterminé jeudi que la défense n'avait «pas démontré clairement les dommages irréparables si elle est renvoyée au Guatemala».

L'avocat en matière d'immigration et de droits humains a aussi relaté que le juge estimait qu'elle est en situation irrégulière depuis au moins cinq ans au Canada - et qu'elle aurait dû «faire une révision judiciaire d'autres décisions antérieures».

«J'ai fait valoir qu'elle a déposé une demande de résidence humanitaire très étoffée avec énormément d'appuis depuis plus que six mois, (...) et qu'elle a droit d'avoir une décision avant d'être renvoyée», a-t-il affirmé en entrevue.

Il a par ailleurs relevé un «état de crise» de sa cliente.

«Moi je m'attendais à plus de respect pour les conditions médicales et psychiatriques de madame, et qui est vraiment dans un état de crise, et qu'on pourrait suspendre le renvoi pour lui permettre de se rétablir», a déclaré Me Istvanffy.

Lucy Francineth Granados a été arrêtée le 20 mars par les agents des services frontaliers en vue de sa déportation. La procédure a été reportée en raison de l'hospitalisation d'urgence de la mère monoparentale.

Une plainte a été déposée à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse pour dénoncer le comportement jugé abusif de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et le traitement qu'elle subit actuellement. La femme aurait été blessée au bras et à la gorge pendant son arrestation.

Mme Granados est toujours détenue dans une cellule du Centre de surveillance de l'immigration de Laval.