Le gouvernement Couillard et le Protecteur du citoyen pressent la Régie du logement de renoncer à une décision controversée de cesser de publier une estimation des hausses de loyer.

Chaque année, la Régie publie un communiqué qui informe la population du calcul des augmentations de loyer. Jusqu'à l'an dernier, elle publiait aussi une estimation des hausses de loyer auxquelles pouvaient s'attendre les locataires de logements non chauffés ou chauffés à l'électricité, au mazout ou au gaz.

Ce tableau servait de repère aux locataires, qui pouvaient ainsi évaluer si leur augmentation de loyer était raisonnable à la lumière de la fluctuation des coûts du chauffage.

Or, a appris La Presse, le ministre des Affaires municipales, Martin Coiteux, et le protecteur du citoyen, Claude Dussault, viennent tous deux de demander à la Régie de faire marche arrière.

Dans une lettre expédiée la semaine dernière, que La Presse a obtenue, M. Coiteux invite la présidente de la Régie, Anne Morin, à réexaminer la réforme.

« Bien que je puisse comprendre le désir de la Régie de mettre l'accent sur des outils de calcul afin que les locateurs et locataires puissent s'entendre sur une éventuelle hausse de loyer, je ne suis pas convaincu que l'arrêt de la diffusion de cette information fut opportun puisqu'une réflexion sur le fonctionnement de la Régie est prévue », écrit le ministre des Affaires municipales, dans une lettre à la Régie du logement.

Le Protecteur du citoyen a lui aussi lancé une charge contre la réforme. Dans une lettre expédiée hier, M. Dussault recommande carrément à la Régie « de reprendre immédiatement la diffusion des estimations d'augmentation de loyer ».

Il fait valoir que la réforme pénalise les locataires qui souhaitent contester une hausse de loyer. Ceux-ci doivent désormais se fier à des informations fournies par leurs propriétaires dans le cadre de leurs démarches.

« Il est en effet peu probable que les propriétaires transmettent systématiquement à leurs locataires les renseignements complets avec la demande d'augmentation de loyer, d'autant plus que la Loi ne les oblige pas à le faire », fait valoir M. Dussault.

CONTESTÉE

La fin de la publication des indices d'augmentation de loyer a suscité l'ire des associations de locataires, qui ont accusé la Régie de « céder au lobby des propriétaires ». Le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) a organisé des manifestations la semaine dernière pour contester le changement.

Son porte-parole, Maxime Roy-Allard, rappelle que la Régie encourage les propriétaires et les locataires à s'entendre à l'amiable sur des hausses de loyer.

« Pour que les deux parties négocient, il faut quand même donner des outils aux deux, résume-t-il. Sinon, le rapport de forces est inégal. »

La décision de la Régie a aussi soulevé des critiques à l'Assemblée nationale. Le député de Québec solidaire Amir Khadir a appelé le Protecteur du citoyen à enquêter sur la question. Puis, hier, la députée du Parti québécois Catherine Fournier a pressé le ministre Coiteux de faire rétablir l'outil d'information « dans les plus brefs délais ».