Les signaleurs routiers sont en colère. En pleine opération orange, alors que la surveillance dans les zones de chantiers routiers est accrue, un signaleur dit avoir été volontairement fauché par une automobiliste. Excédée, l'Association des travailleurs en signalisation routière du Québec (ATSRQ) demande au gouvernement de durcir le ton.

« On se fait constamment insulter et on fait avec. Mais quand on met ta vie en danger, il y a toujours bien des limites ! », rage Éric Guay. Vendredi, il a eu toute une frousse alors qu'il travaillait comme chef d'équipe sur un chantier situé sur la route 139, à Sutton.

Une automobiliste n'a pas apprécié la directive du signaleur lui enjoignant d'attendre derrière une ligne d'arrêt, selon M. Guay. « Je lui ai dit d'attendre et elle m'a envoyé promener », dit-il. M. Guay a détourné la tête quelques secondes et, cela ne fait aucun doute dans sa tête, la conductrice a foncé sur lui. Il a roulé sur le capot du côté passager avant de retomber au sol sur le dos.

La femme a poursuivi sa route, mais a été interceptée à la sortie de la zone de chantier, ajoute M. Guay. La Sûreté du Québec, qui a été appelée sur les lieux, a confirmé l'incident, mais le rapport ne fait aucune mention d'un geste volontaire, a précisé le sergent Claude Denis, porte-parole de la SQ.

Le sergent Denis a toutefois confirmé que la conductrice de 32 ans avait reçu un constat de 162 $ pour ne pas avoir respecté la signalisation ainsi que 3 points d'inaptitude.

« Un assaut »

M. Guay, lui, a été transporté en ambulance à l'hôpital de Cowansville. « J'ai des nerfs coincés dans le bas du dos et je ressens de grosses décharges électriques », dit l'homme de 44 ans joint au téléphone par La Presse. Il est maintenant en arrêt de travail pour un mois. Sa belle-fille et sa fille, qui sont toutes deux signaleuses depuis peu et se trouvaient sur le chantier, ont été ébranlées par l'accident et sont elles aussi en arrêt de travail.

« Quand j'ai su que la conductrice n'avait eu qu'une amende, je n'en revenais pas ! C'est un assaut ! », s'insurge M. Guay. En cinq ans de métier, il s'agit de son deuxième accident. L'an dernier, il était entré en collision avec un automobiliste qui avait traversé un chantier dans une zone réservée aux travailleurs.

« Notre job n'est pas facile, les gens sont tellement pressés et ce ne sont pas les campagnes de sensibilisation qui font une différence ! », lâche-t-il.

Trop de clémence

L'ATSRQ exige du gouvernement qu'il impose des sanctions plus sévères. M. Dionne affirme d'ailleurs avoir rencontré le ministre des Transports Robert Poëti, il y a quelques mois, et soutient que ce dernier s'est engagé à imposer des amendes plus lourdes pour les infractions commises sur les chantiers de construction.

Valérie Rodrigue, attachée de presse du ministre Poëti, a précisé que des discussions avaient eu lieu sur le respect de la signalisation sur les chantiers dans le cadre de la modernisation du Code de la sécurité routière. Elle ne pouvait toutefois confirmer si le ministre avait bel et bien pris un tel engagement.

L'ATSRQ interpelle également le ministère de la Justice afin que des accusations soient systématiquement portées contre les automobilistes impliqués dans des accidents où un signaleur est blessé. « Si l'automobiliste n'est pas en tort, alors il sera acquitté, mais en ce moment, si le signaleur n'est pas blessé gravement, c'est très rare que des accusations soient déposées. »

Le sergent Denis a confirmé que les agents reconstitutionnistes sont généralement appelés lorsqu'il y a des blessés graves. Il précise que le rapport d'incident à Sutton fait état de « blessures mineures ».

Le mois dernier, un homme en état d'ébriété qui roulait dans une zone de chantier et a blessé un signaleur s'est vu imposer une peine de 90 jours de prison. Une sentence beaucoup trop clémente, selon M. Dionne.