Un an après la tragédie de L'Isle-Verte, plus de la moitié des résidences privées pour aînés ne sont toujours pas protégées par des gicleurs. Québec n'a pas encore changé la réglementation.

«C'est dramatique. Je me serais attendu à ce qu'il y ait du chemin qui soit fait après cette tragédie qui a bouleversé le Québec, mais on n'a absolument pas progressé», affirme le député caquiste François Paradis. Il a fait une demande d'accès à l'information récemment pour obtenir un bilan de la situation au sujet de l'installation de gicleurs, des données semblables à celles obtenues cette semaine par La Presse.

Ainsi, 1041 établissements sur un total de 1905 (55 %) ne sont protégés par aucun système de gicleurs. C'était 1052 il y a un an.

Le ministère de la Santé note que la majorité des résidants sont hébergés dans des «établissements giclés». La quasi-totalité des résidences qui ne le sont pas comportent moins de 50 unités. Elles se trouvent en grande partie hors des grands centres urbains, ajoute le Ministère.

Réglementation

Dans la foulée de l'incendie de la Résidence du Havre, Québec a mené des travaux en vue de changer la réglementation. À l'heure actuelle, des gicleurs ne sont obligatoires que pour les bâtiments neufs de quatre étages et plus.

Le gouvernement Couillard a publié en septembre, dans la Gazette officielle, un projet de modification au Code de construction pour que toutes les nouvelles résidences soient munies de gicleurs, à l'exception des plus petites. Les résidences d'un étage et d'un maximum de huit logements - donc au plus 16 personnes - ne seraient pas visées. Tout comme les résidences de type unifamilial d'au plus deux étages, qui hébergent moins de 10 personnes et dont le propriétaire habite sur place.

Or, ce projet n'a toujours pas été adopté, même si le Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA) demande au gouvernement d'agir rapidement. L'adoption sera faite «au cours des prochains mois», dit-on à la Régie du bâtiment et au bureau du ministre responsable, Sam Hamad.

Québec a également entamé la rédaction d'un règlement pour obliger les résidences existantes à installer des gicleurs, toujours à l'exception des plus petites. Mais il préfère attendre le rapport d'enquête du commissaire Cyrille Delâge avant d'adopter quoi que ce soit. Ce rapport devrait être rendu public d'ici le printemps, selon le Bureau du coroner.

«Il va y en avoir un règlement, et il va arriver en 2015. On est en train de le finaliser», affirme le ministre de la Santé, Gaétan Barrette. Il ajoute que le dossier interpelle également d'autres ministères, dont la Sécurité publique et le Travail.

Son ministère a déjà estimé à 80 millions la facture de l'installation de gicleurs dans les résidences. M. Barrette s'est limité à dire qu'elle est «dans les hautes dizaines de millions». Le RQRA souhaite que Québec offre une aide financière aux propriétaires. «À cette étape-ci, je ne peux m'avancer là-dessus», a dit M. Barrette.

Cyrille Delâge recommandait dès 1997 que des gicleurs soient installés dans les résidences. En novembre, lors des audiences publiques sur la tragédie de L'Isle-Verte, il a toutefois affirmé qu'il ne fallait pas penser que «les gicleurs vont régler tous les problèmes comme c'est la mode». Il faut s'attendre à des recommandations sur plusieurs fronts.

Rappelons qu'en décembre, Québec a mis en place un programme d'aide pour la formation des pompiers volontaires ou à temps partiel. Le budget est de 19,5 millions sur cinq ans.

En donnant aux agences de la santé les budgets pour le maintien des actifs, cet été, Gaétan Barrette a demandé que tous les CHSLD soient munis de gicleurs d'ici le 30 septembre 2016. Vingt-deux CHSLD n'ont pas de gicleurs, trois de moins qu'il y a un an.

En chiffres

Sur les 115 653 unités dans les résidences pour aînés du Québec...

73 440 sont protégées par des gicleurs.

22 074 le sont partiellement.

20 139 n'ont pas de gicleurs.

Sur les 424 CHSLD du Québec...

362 sont entièrement protégés par des gicleurs.

40 le sont partiellement.

22 ne sont pas munis de gicleurs.