Des soldats et des vétérans canadiens, dont plusieurs souffrant de stress post-traumatique, sont arrivés à Londres dimanche après une randonnée à vélo de six jours entre Paris et la capitale britannique.

L'événement a été organisé par Help for Heroes, une oeuvre de bienfaisance britannique qui a rassemblé pour l'occasion 300 participants provenant du Royaume-Uni, du Canada est des États-Unis, dont plusieurs militaires ayant perdu des membres en Afghanistan et en Irak.

Les cyclistes ont visité de nombreux champs de bataille dans le nord de la France et ont reçu un accueil chaleureux à leur arrivée à Londres, où ils ont terminé leur voyage sur la place d'armes de la cavalerie de la Garde.

La plupart des Canadiens ayant pris part à la randonnée ont été commandités par l'organisme Wounded Warriors Canada.

Dave Penasse, un ancien conducteur de véhicule blindé qui s'est battu en Bosnie, a dit craindre que, avec la fin de la guerre en Afghanistan, le public oublie les 2047 soldats qui ont été blessés physiquement et mentalement durant le conflit.

«C'est triste, mais si un pays n'est pas en guerre, les médias parlent moins des militaires et finissent par ne plus en parler du tout, a-t-il indiqué. Les gens oublient facilement ce que ces personnes ont vécu.»

Un sentiment partagé par Bryn Parry, le cofondateur et directeur général de Help for Heroes, qui a affirmé que la majorité des monuments commémoratifs étaient pour les morts mais qu'il faudrait en ériger un pour les blessés.

«Souffrir en silence»

Le gouvernement de Stephen Harper est très fier lorsqu'il dit avoir injecté 130 millions $ de plus dans le système de soins de santé de l'armée depuis son élection, dont 11,4 millions $ pour la santé mentale.

Mais lorsque l'on discute avec des soldats ou des anciens combattants, on constate que ce système est encore caractérisé par une lourde bureaucratie, l'indifférence occasionnelle des dirigeants et, surtout, les préjugés.

Si un militaire lève la main et avoue qu'il a un problème avec les horreurs dont il a été témoin, cela peut signifier la fin de sa carrière, particulièrement dans les unités de combat comme l'infanterie.

«C'est la culture, la culture qui est totalement différente, a expliqué John Lowe, un ancien caporal qui a servi en Afghanistan. L'une de nos devises, c'est de souffrir en silence. C'est ce qui est honorable. C'est ce que l'on nous enseigne. Si vous avez mal, secouez-vous et continuez à avancer.»

L'un de ses camarades de l'armée lui a déjà conseillé d'avaler ses médicaments et de ne pas trop en parler. «Bref, il m'a dit de prendre des pilules ou de boire de l'alcool pour régler mes problèmes», a résumé M. Lowe.

Andy Godin, un adjudant retraité qui a dû lutter contre ses propres démons après avoir vu les Serbes et les Croates jeter leurs morts dans la rivière Miljacka dans les années 1990, a été fâché d'apprendre l'histoire de John Lowe.

«Ça me met vraiment en colère, a-t-il lancé. Nous consacrons des ressources à quelque chose, nous avons un système en place, nous évaluons la santé mentale des troupes après chaque mission, mais est-ce que ces programmes fonctionnent? Je ne sais pas.»

M. Godin a fait remarquer que le nombre de demandes liées au stress post-traumatique présentées au ministère des Anciens combattants ne cessait d'augmenter et que le système était efficace pour montrer aux soldats comment obéir aux ordres et tuer, mais pas sur comment gérer les conséquences de ces actes.

Le personnel du ministre de la Défense, Peter MacKay, a refusé d'accorder une entrevue à ce sujet mais a émis un communiqué rappelant les investissements cités plus haut et disant que le gouvernement avait adopté plusieurs mesures pour améliorer la situation.

«En fait, lorsqu'on les compare à leurs alliés de l'OTAN, les Forces canadiennes ont le plus grand ratio de spécialistes en santé mentale par soldat», a précisé une porte-parole.