L'interdiction de fumer dans les prisons coûtera 2,1 millions de dollars au ministère de la Sécurité publique du Québec. De cette somme, 1,3 million sera dépensé en produits de remplacement de la nicotine.

Le 19 avril dernier, le ministre de la Sécurité publique du Québec, Stéphane Bergeron, a annoncé que le tabac serait interdit dans ses 18 établissements de détention du Québec d'ici un an. Pour accompagner les détenus, diverses mesures de soutien seront mises en place.

Outre les produits de remplacement de la nicotine, le Ministère prévoit offrir aux détenus des collations santé, des «contributions» du personnel du service de santé des établissements ainsi que des séances d'information et de sensibilisation pour arrêter de fumer et avoir de saines habitudes de vie.

Questionné par La Presse en avril au sujet des coûts associés à ces mesures, le Ministère a été en mesure de fournir les informations cette semaine. «Les coûts seront de 2,1 millions et seront assumés à même le budget du Ministère», a précisé Clément Falardeau, attaché de presse du ministère de la Sécurité publique.

«Ça peut paraître cher, mais ça vaut le coup, souligne le criminologue Serge Brochu, de l'Université de Montréal, qui a dirigé une étude de l'Institut national de santé publique du Québec en 2010. Quelque 80% des détenus fument, et le personnel est exposé à ça.» Le Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec demandait d'ailleurs depuis plusieurs années que le tabac soit complètement interdit.

Pas tous convaincus

Robert Poëti, porte-parole de l'opposition en matière de sécurité publique, doute de l'efficacité de ces mesures. «Dire aux gens du jour au lendemain qu'ils ne peuvent plus fumer, et on leur donne des patchs et des petites collations... Est-ce qu'ils vont mettre des calmants, là-dedans? Tant mieux si ça marche, mais j'ai une crainte pour la sécurité.»

Il précise qu'il n'est pas contre la vertu, mais il croit que le Ministère devrait d'abord s'attaquer au problème de surpopulation dans les centres de détention.

Rien n'est prévu dans cette enveloppe pour lutter contre la contrebande.

La Presse avait révélé en février dernier que l'interdiction de fumer dans les prisons fédérales, en vigueur depuis 2008, avait fait émerger un marché noir encore plus important que le trafic de stupéfiants.

Au Canada, aucune étude ne s'est penchée sur les ressources offertes pour aider les détenus à arrêter de fumer. Selon l'étude de M. Brochu, dans certains établissements canadiens, des cas d'abus des substituts nicotiniques ont été observés (utilisation de produits de substitution pour fabriquer des cigarettes artisanales, commerce illégal de timbres de nicotine). «Mais c'est peu documenté, et ça semble plutôt rare. Je n'ai pas l'impression que ce sera une épidémie», dit le criminologue.