Sylvain Carbonneau, le facteur trop serviable congédié en décembre par Postes Canada, admet avoir pris quelques kilos depuis qu'il ne distribue plus le courrier. Mais ses réserves financières fondent à vue d'oeil.

Quatre mois après son renvoi, il se retrouve dans une situation plus difficile que jamais. Négociations avec l'employeur, grief et demande d'assurance-emploi: rien ne semble fonctionner pour le travailleur de 47 ans.

«Des fois, je capote. J'ai des downs. J'essaie que ça ne paraisse pas devant mes enfants», a-t-il avoué samedi, lors d'une entrevue avec La Presse. «C'est dans ma tête aussi. Je ne sais pas si tu as déjà arrêté de travailler pendant quatre mois? C'est pas le fun. Il faut qu'on travaille, sinon on n'est rien.»

La société d'État lui réclame même plus de 2000$, payés en salaires supplémentaires. «Mes enfants vont manger avant que je leur envoie de l'argent, c'est sûr», a-t-il ajouté.

En décembre, son renvoi n'était pas passé comme lettre à la poste: une vague de solidarité avait rapidement déferlé sur ce facteur qui faisait tout pour aider ses clients. À la demande de certains d'entre eux, il laissait parfois des colis devant une porte ou signait des avis de réception à leur place. C'est ce qui l'a perdu. Postes Canada a jugé que ces gestes justifiaient son renvoi.

«Ce n'était pas malicieux, c'était seulement pour faire plaisir à mes clients, a-t-il répété samedi. Ça ne changeait rien pour moi. Je ne faisais pas plus d'argent, je ne finissais pas plus tôt.»

Chômage refusé

Depuis décembre, M. Carbonneau fait un véritable chemin de croix.

À Noël, il a dû expliquer à ses deux adolescents que le sapin n'abriterait pas de présents cette année.

Ensuite, sa demande d'assurance-emploi a été refusée à deux reprises. Le conseil chargé de trancher au sujet de sa contestation a jugé qu'il a été insouciant. Il a donc commis une faute et n'a pas droit à un chèque mensuel.

«La sévérité de la mesure prise à l'égard du prestataire [son congédiement] était peut-être trop stricte, mais il n'en revient pas au conseil arbitral d'en juger», ont ajouté les décideurs.

Sylvain Carbonneau a donc été obligé de décaisser les REER qu'il avait réussi à accumuler. «C'était pour la maison, a-t-il expliqué, avec regret. Je m'appauvris.»

Les négociations avec l'employeur semblent s'enliser, du moins de son point de vue.

Le facteur ne s'attend pas à pouvoir plaider son grief devant un arbitre avant sept ou huit mois. Son syndicat l'appuie dans cette démarche.

Impatient de voir son dossier se régler et découragé par l'attente, il espère maintenant faire bouger Postes Canada en attirant à nouveau l'attention sur son dossier.

La société d'État n'a pas rappelé La Presse au cours de la fin de semaine.